labrys, études féministes/ estudos feministas
juillet/décembre 2011 -janvier /juin 2012  - julho /dezembro 2011 -janeiro /junho 2012

Deux mille lieues à travers les sertões & Deux mille lieues à travers la ville

Norma Telles

Résumé

Durant quatre ans l´éducatrice Leolinda Daltro parcourut de part en part les sertões, motivée par son projet de catéchèse laïque. Si en chemin elle rencontra obstacles et ennemis qui allèrent jusqu´à mettre sa vie en péril, elle trouva aussi des amis et des collaborateurs. Elle fonda une colonie sur les rives du fleuve Araguaia afin de protéger les indigènes d´ethnies diverses et de les éduquer. Faute de moyens, le projet ne put être mené à son terme. Au cours de ses périples elle put observer et prendre des notes concernant les caractéristiques des paysages qu´elle peignait, à partir des  histoires des habitants et des événements de la région. De retour en ville, elle tenta de présenter ses nombreuses observations dans les cercles scientifiques mais en fut empêchée par sa condition de femme. En ville, les difficultés surgissaient de toute part, mais elle continua sa route dans l’intérêt de la réalisation de ses objectifs.

Mots-clés : voyageuses; indigènes sous la république; vote féminin.

 

I promise to show you a map you say    but this is a mural

Then  yes let it be   these are small distinctions

Where  do we see it from is the question

              Adrienne Rich

LE GRAND TOUR

Depuis le dix-septième siècle, l´emploi du mot voyage désigne aussi bien le déplacement que le récit de celui-ci, et suggère ainsi un étroit rapport entre l´expérience vécue et la narration, rapport qui dans la culture occidentale se rénove sans cesse: des voyages fondateurs tels qu´ils sont rapportés par Homère ou Virgile aux innombrables mythes de l´Antiquité Classique. À l´ombre de ces histoires sans aucun doute délicieuses, si souvent répétées, se trouvent les récits de voyages faits par les femmes des temps anciens –  nous n´entendons pas les voix d´Europe, des femmes de Troie, d´Hélène ou de Médée, mais seulement ce que l´on raconte d’elles.

Qu´est-ce qu´un récit de voyage? C´est autant une narration de quête que d´exil, de découverte que de commémoration; aussi bien un voyage aux longs cours qu´un bref déplacement aux innombrables rebondissements; il y a des voyages culturels comme ceux de Flaubert, scientifiques comme ceux de Darwin et même des voyages qui dépassent les frontières de notre planète. Il est des voyages d´exploration conduits par une mission, comme ceux du docteur David Livingtone ou ceux de Dona Leolinda Daltro que nous allons suivre ici :

“L´ethnographe occidental, le poète moderniste expatrié, l´écrivain de récits populaires de voyages et le touriste, peuvent tous participer à la fabulation qui s´empare des déplacements, des récits, sans pour autant questionner les bases culturelles, politiques et économiques de leurs  situations respectives, de leurs privilèges, de leurs milieux et  de leurs limitations. Immigrés, réfugiés, exilés, nomades et sans-abri évoluent au dedans et au dehors de ces discours comme métaphores, tropes ou symboles, mais rarement comme d´historiques producteurs de discours critiques reconnus (Kaplan :1996 :2) ».

Dans un beau poème, ”Questions de Voyage”, Elizabeth Bishop signale un procédé paradoxal, celui de la double implication du ‘voyager’ qui peut apporter un nouvel éclairage non seulement sur le ‘Ici’ mais également sur le ‘Là’ et, en même temps, perturber certaines préconceptions confortables, car quel que soit le voyage, celui-ci est toujours un mouvement circulaire autour de soi-même.

Le récit de Voyage, informel ou multiforme, se révèle difficile à cerner. Il semble fait de miettes d´impressions, de descriptions, de digressions et il est toujours fascinant. Des modes différents de se déplacer amènent des modes différents d´écrire: Ginzburg rappelle que le chasseur nomade et la femme qui se livre à la cueillette suivent les animaux d´après leurs empreintes, déchiffrent les signes dans la végétation et repassent leurs lectures du milieu à leurs compagnons; et tels furent bien les premiers narrateurs. De leur côté, les découvreurs cisèlent des signes sur les nouvelles terres en sculptant des croix et  érigeant des monuments (Butor :1958). Les explorateurs, quant à eux,  établissent déjà des cartes géographiques et comme nous le rappelle le poème de Rich,  différents récits signalent diverses perspectives à partir desquelles les paysages sont vus et les paroles sont formées.

Par conséquent, les abordages de ce genre littéraire sont inégaux, mettant au premier plan les ambigüités et les soupçons qu’ils suscitèrent  bien longtemps – et qui persistent lorsque le voyageur est une femme. Leolinda Daltro, pour des raisons de santé et à cause de pressions politiques qui l´effrayèrent, présenta la chronique de ses années de sertões de manière fragmentée et inhabituelle. Elle présenta tous les documents, lettres, actes notariés qu´elle avait collectés et fit le montage de son texte comme se fait celui d´un album de jeune fille qui recueille poèmes, citations et  vœux; mais à la différence de ceux-ci son

Mémoire regroupe des coupures de journaux, des caricatures, des nouvelles et des documents provenant d´études de notaire, lettres et hommages.  

‘‘Tout document, même parmi ceux qui à première vue semblent être sans importance, équivaut à un trésor de vérités et occupe une place distincte dans l´histoire de mon excursion dans les tribus sauvages (CIB : XX)’’.

Généralement les livres de voyage témoignent avant tout de l´effervescence de la pensée occidentale provoquée par cette expérience que fut ou est encore la rencontre de l´autre. Une expérience qui  depuis le seizième siècle, avec l´expansion coloniale Ibérique, fait le récit d´une confrontation brutale entre des cultures et des mondes différents où s´entremêlent violence physique et violence psychologique.

Dans les temps modernes, l´horreur - que Conrad inscrivit pour toujours au cœur de l´obscurité, et Freud au cœur de ce continent obscur qu´est la femme - survient  de cette rencontre/non-rencontre et a pour présupposé un certain type d´homme qui incarne selon l´époque une idée prétendument universelle : religion, civilisation, démocratie. À ce moment précis de l´histoire où le monde entier paraissait appartenir à ‘’l´Ouest ’’, la littérature de voyage (journaux, lettres, souvenirs) associée aux rapports professionnels des administrateurs des diasporas ou des immigrations en masse, produisit un matériel qui devait influencer la science, la littérature et les politiques extérieures pour plusieurs générations.

Le légendaire ‘’voyageur’’ que cette littérature a fixé, c´est l´homme ‘‘blanc’’, introspectif et cultivé. Dans les faits, cette position centrale du voyageur a également été occupée depuis l´antiquité par d´innombrables femmes et plus particulièrement par un grand nombre d´entre elles à partir du dix-neuvième siècle, mais aussi par des personnes appartenant aux plus diverses ethnies, classes ou nationalités.Néanmoins la figure héroïque du ‘‘voyageur éclairé’’ persiste dans les esprits et les représentations occidentales. Un lieu sur une carte est également un lieu dans l´histoire, nous rappelle Rich. Les lieux comme les voyages sont inévitablement liés aux questions de genre, de race et de classe. La distance parcourue porte la marque des tensions; non seulement le genre a un impact sur la mobilité mais il produit également des localisations.

LE CADRE

 À partir de 1870 surgissent au Brésil,  avec l´Abolition de l´esclavage, des altérations qui vont avoir des conséquences sur le régime de travail, et avec la proclamation de la République sur la politique, bien que la réorganisation de la société n’ait pas fondamentalement modifié les structures. La rapide expansion du capitalisme dans les campagnes engendra des foyers de conflits opposant  populations indigènes et colons : les dénonciations de massacre d´indiens et les morts de colons attribuées aux indigènes devinrent fréquentes. Il semblait que la frontière qui séparait les uns des autres était constamment modifiée et que la guerre n´en finirait jamais. Jusqu’à la fin de l´Empire, le travail  d´intégration des indigènes à la société conquérante sera à la charge de l´Église Catholique et les missionnaires recevront des subventions du gouvernement.

Avec la République et l´introduction du concept de catéchèse laïque, l´église perdit de substantiels  privilèges, alors qu´avec l´extinction du travail esclave augmentaient les besoins en main d´œuvre libre, pendant  que les fronts d´expansion avançaient à un rythme accéléré. À São Paulo ils affrontèrent les Kaigang appelés   indiens couronnés, alors que dans l´État de Santa Catarina ils se heurtèrent aux Kokleng. Les indiens défendaient leur habitat, les étrangers voulaient  obtenir par les armes la reconnaissance  des terres dont ils avaient acquis les titres de propriété, tandis que le capital recherchait des terres  pour ses entreprises.

Les attaques des indiens étaient relatées dans la presse non sans un sensationnalisme qui favorisait la propagation de l´image du sauvage des forêts comme étant un animal féroce et traître. Il y avait encore d´autres zones d´affrontements et dans certains villages établis par les pères capucins de la région centrale, il y eut des révoltes qui furent amplement couvertes par la presse ne présentant au public que la version des conquérants. L´omission de l´État pendant l les premières décennies de la République aggrava la situation et laissa le champ libre aux intérêts économiques privés pour occuper les terres dites dévolues.

Les diverses opinions et les articles de journaux encouragèrent les  discussions parmi les populations urbaines. On assista alors à de chauds débats sur les droits des indigènes et une partie des classes moyennes des villes se mit à soutenir leur cause. Globalement on peut dire qu´il existait trois positions sur ce sujet : la position religieuse, la plus conservatrice liée aux oligarchies; la position laïque qui reflétait la position des intellectuels et de ceux qui exerçaient des professions libérales comme le professeur Leolinda Daltro. Ces deux courantsproposaient d´intégrer l´Indien à la société tout en divergeant cependant sur les moyens d´y parvenir. La troisième position, que défendait l´avant-garde des forces d’expansion, exigeait des mesures immédiates, extermination ou emprisonnement des groupes autochtones, pour que le progrès puisse continuer sa marche en avant (Gagliardi : 1989 :134).  

LE DÉPART

En 1896, le journal O País  annonce l´arrivée dans la capitale d´un groupe d´indiens dont le chef était Xerente Sepé, originaires du village de Providência, situé sur les rives du fleuve Tocantins dans l´État de Goiás. Le groupe était venu parler au Président, à Rio de Janeiro, pour demander des outils, des vêtements, des armes et un instructeur d´enseignement pour continuer l´œuvre de civilisation.

En ville ils furent conduits dans un commissariat où ils furent mal installés. Sepé était venu avec des compagnons d´autres ethnies, tous originaires de villages fondés par les missionnaires qui les avaient abandonnés. L´article du journal affirme que le village abritait de bons travailleurs et que Sepé parlait ‘‘« un excellent portugais et avait d´excellentes manières’’ ». Sepé déclara au journaliste que son village était « enviable, en vérité» sans le moindre cas de crime ni d´infidélité conjugale, et qu´il ne manquait que quelqu´un pour leur apprendre à écrire.

Après un long voyage de plus de six mois, les indiens se retrouvaient donc dans le commissariat on ne se peut plus mal installés: la salle où ils demeuraient était humide, sans fenêtre et ils dormaient à même le sol sans pouvoir prendre le moindre bain. Selon le reporter, ils commençaient à se repentir d´être venus puisque rien ne semblait devoir résulter de cette longue marche. C´est alors que Leolinda Daltro entre en scène :

“...[les visiteurs] sensibilisèrent grandement l´imagination méridionale et l´âme généreuse et douce  d´une dame distinguée,  professeur à Rio de  Janeiro: Dona Leolinda de Figueiredo Daltro. À ses yeux de femme instruite, à l´esprit ouvert à la fantaisie par des lectures romanesques de voyages à travers les lointains sertões [...] l´histoire de ces indiens sympathiques, l´organisation exemplaire de leur village ; la douceur de leurs mœurs  véritablement admirables, tout prit le caractère d´une irrésistible séduction (CIB : 9) ’’ (mots en italique soulignés par nousCT).

  Les qualificatifs attribués à Daltro par l´article, ‘’imagination méridionale’’, que les sens impressionnent facilement; fantaisies à partir de ‘’lectures romanesques’’ ainsi que séduction due à ‘‘ la douceur’’ des coutumes des indiens et à leur condition carencée, mettent en évidence le malaise du journaliste devant quelqu´un qui avait accepté d´être maîtresse d´école de ce groupe d´indiens et de les  suivre sur le chemin de retour vers leur village. C´étaient les mêmes attributs que l´on donnait généralement aux femmes: facilement impressionnables, guidées par leurs sensations ou par des lectures fantaisistes qu´elles n´assimilaient pas vraiment, ou encore séduites par tout ce qui pouvait avoir la docilité de l´enfant ou de tout autre être fragile et souffrant. Pour eux, les femmes abdiquaient généralement  toute vie personnelle.

Tout de suite après, le journaliste évoque cette sainte mère toujours disposée aux sacrifices, ceux en l´occurrence suscités par ‘‘ les mots douloureux  du sincère Sepé ’’. Par cette affirmation, il met en place dans l´esprit des gens d´alors, un paradoxe sans solution : comment une sainte mère peut-elle répondre aux appels au secours des malheureux, alors que justement ce fait l´oblige à abandonner ses propres enfants ? Et dans ce cas que devient-elle, un monstre? Le fait qu´elle soit professeur donnait à cette femme un espace et peut-être une assurance, qui faisait que les termes choisis s´enchaînent de manière subtile, laissant malgré tout apparaître les tensions.

Qui était Leolinda Daltro? Née dans l’État de Bahia, élevée   par sa grand-mère, elle descendait de Tupis et de Timbaras, comme elle aimait à le raconter, et avait cinq enfants qui vivaient à Rio de Janeiro.

“Je suis professeur titulaire ici, dans le District Fédéral, profession dont les attributions étaient très limitées à l´époque où je fus nommée. Le programme de l´enseignement primaire était alors par trop déficient; l´enseignement se  limitait à la lecture, à la grammaire et aux quatre opérations fondamentales de l´arithmétique[...]. Je trouvais que c´était peu et que comme professeur je pouvais l´amplifier, ce que je fis en inaugurant un nouveau programme scolaire. Je commençai donc à enseigner les ARTS ET PROFESSIONS. (IFB:7)’’

C´est ainsi que Daltro se présente lors d´ une réunion en 1909. Dans l´exercice de la profession d´éducatrice elle introduisit de nouveaux enseignements: des expositions pédagogiques (une première encore sous l´Empire: c´était du jamais vu à Rio de Janeiro et elle fut bien reçue par le public et par les autorités, sans oublier la visite et les louanges de la Princesse Isabel et du prince consort); des promenades pour les enfants afin qu´ils puissent être au contact de ‘‘la nature’’ et l´aimer; des visites d´expositions et  de musées ou encore la participation active à des festivités nationales ou à des hommages de portée  nationale.

Sevcenko(1992) attire l´attention sur la mobilisation des corps lors des événements publics du fait de la réorganisation sociale et des (nouveaux) systèmes symboliques. La société de l´époque cherchait à forger de nouvelles identités collectives, nationales, imposant une discipline physique qui pourrait également agir sur les masses urbaines.  Quand le groupe de Sepé arriva à Rio, l´éducatrice avait déjà commencé sa carrière dans l´enseignement public; réformant, à l´usage des écoles qu´elle dirigeait, le maigre programme scolaire officiel des activités réservées aux enfants. Elle avait aussi élaboré un programme plus vaste qui visait à garantir la subsistance des élèves (cours technique) et une formation plus humaniste qui enseignait l´amour de la nature et des arts. L´objectif était de former un citoyen prêt à affronter la vie, actif et conscient des besoins de la nation. C´est cette même idée de former des citoyens respectables et bien adaptés qu´elle devait étendre aux indigènes et aux femmes dans des campagnes souvent parallèles. Mais, comme elle le mentionne dans sa présentation de 1909, dès ses débuts dans la vie publique elle provoqua, de par les succès obtenus, l´envie et la médisance.

           “Et moi j´étais là, dirigeant l´École mixte de Santa Izabel à Matadouro de Santa Cruz’’ continue Daltro, ‘‘lorsque je remarquai que de nombreux enfants ne fréquentaient pas l´école parce qu´ils aidaient leurs parents à la fabrique. C´est alors que j´ai institué des cours nocturnes pour eux et pour les ouvriers, cours qui continuèrent même après que je fus mutée dans d´autres écoles’’. Ces cours ne relevaient pas du programme officiel, ne recevaient aucune subvention et c´est grâce à ses propres deniers qu´ils purent être maintenus.                    

Ainsi la femme émue par la demande d´aide des sauvages venus en ville, ne correspondait pas à l´image idéale de pureté passive du monde bourgeois. C´était une éducatrice engagée qui planifiait des actions qui lui paraissaient importantes pour les personnes, pour la collectivité et pour la nation. En 1896, ‘‘je dirigeais’’ l´ECOLE BARRA DA GÁVEA lorsque j´ai conçu comment réaliser mes idéaux de civilisation indigène (IFB : 9)’’.  Elle pensait qu´il  fallait y répondre et elle ne partit donc pas sous l´impulsion d´une ‘‘ imagination méridionale’’, mais bien à partir d´un plan délibéré de catéchèse laïque qu´elle avait tracé et prétendait exécuter.

Daltro offre ses services au gouvernement en échange du maintien de son poste de professeur rémunéré. Le Président Prudente de Moraes refuse ‘‘pour deux raisons’’: 1) par manque de ressources et 2) parce qu´elle est une femme et qu´il est nécessaire qu´elle ne parte pas (IFB : l0)’’. Elle lui répondit, ‘‘ma résolution est inébranlable. Il y a suffisamment de ressources dans mon cœur de brésilienne.’’

Partout où elle passera se répétera la scission, comme à Rio de Janeiro, entre ceux qui disaient : ‘’revenez !’’, et ceux beaucoup plus rares qui l´encourageaient à grands cris: « en avant ! »; si certains étaient disposés à l´aider, d´autres s´interrogeaient : pourquoi une femme ayant une belle situation, se disposait-elle à tout risquer dans une aventure dangereuse et excentrique? Pour les caricaturistes de l´époque ce fut là un régal qu´ils ne se lassèrent pas d´exploiter. Le sarcasme et le ridicule finirent par lui peser.  

Daltro vendit tout ce qu´elle put pour avoir de quoi entreprendre le voyage .Il y a là quelque chose d´intéressant à noter à propos des femmes voyageurs : en général elles ne sont pas subventionnées par les gouvernements, les Sociétés Géographiques ou autres, contrairement aux hommes qui ont toujours pu compter sur des appuis, des ressources financières et jouir du prestige de leurs exploits.   Le journal ‘‘Jornal do Brasil’’ suggère la possibilité d´ouvrir une liste de souscriptions, mais les jours passent  sans que rien n´arrive. Les compagnons de Sepé se découragèrent et ‘‘prirent la route en suivant les rails du chemin de fer ’’. Le journal exerça des pressions sur le gouvernement rappelant comme l’État de Goiás était éloigné et combien les moyens de communication étaient lents, mais le gouvernement se refusa à accorder la moindre des contributions sollicitées. En fin de compte les hommes importants de l´administration publique n´auront aucune sympathie pour l´entreprise de l´éducatrice et exerceront des pressions pour qu´elle en  revienne.

 ‘‘Les obstacles aux  prétentions de Dona Leolinda Daltro, qui pleine des plus saintes  intentions quitte foyer et  enfants qu´elle aime passionnément et s´assujettit aux souffrances d´un voyage quasi impossible, sont improductifs‘’ écrit l´auteur de l´article en date du 2 août 1886. Daltro décide de partir ‘‘pour la difficile et délicate mission d´éduquer les indiens Xerente’’ et prend la route en compagnie d´Alfredo, son fils aîné qui quitte son emploi à la Poste pour l´accompagner, et d´un enfant de onze ans, ex-esclave.

 L´image de cette jeune femme vêtue simplement, avec à ses côtés un adolescent et un enfant ex-esclave, accompagnée d´un groupe de sauvages partant à pied parcourir les sertões en quête d´un autre espace plus libre et plus égalitaire, eut sur moi  un profond impact quand je me  retrouvai  pour la première fois face à elle et provoqua ma curiosité de suivre les traces laissées par  ses pas’’.

Daltro partit pour São Paulo, passa par Minas puis par Goiás et  remonta le fleuve Araguaia. Dans la ville de São Paulo, qui était en pleine croissance et se modernisait, elle tente de trouver des financements. Elle est saluée par la presse et un journal ouvre une souscription qui attirera de nombreux souscripteurs. Rapidement deux courants d´opinion s´étaient formés dans la ville parmi les élites et les classes moyennes : le premier en faveur de l´expédition comptait dans ses rangs des noms importants de l´éducation et de la médecine comme la renommée Docteur Maria Renotte qui fit une donation de cent mille reis et le Docteur Horácio Lane, fondateur du collège Mackenzie qui contribua avec une somme de deux cent mille reis et lui obtint une pension mensuelle de cinquante mille reis de l´École Américaine, école dont les élèves et les professeurs apportèrent également leur contribution.

Lane rappelle les noms de certaines dames qui se dévouèrent à civiliser les indiens nord-américains et, la comparant à celles-ci, l´encourage; il réussit également à lui obtenir diverses lettres de recommandation, accepte deux fils de Daltro en internat à l´École Américaine, et se renseignant de toute part lui expose objectivement les conditions qu´elle devra affronter. Le groupe des plus modernes constitué d´intellectuels et de membres des professions libérales – nombre d´entre eux protestants – soutenait le voyage.

L´autre groupe qui s´efforçait d´obtenir le retour de Daltro à Rio de Janeiro, à son foyer auprès de ses enfants, était composé de personnalités en vue de la société de la ville de São Paulo, conservateurs catholiques comme D.Veridiana Prado, Martinho Prado, Fernando Chaves, Elias Fausto,  d´étudiants de la ville de Goiânia qui se trouvaient à São Paulo et d´autres encore. En janvier 1897, Daltro en route reçoit une lettre de Affonso Arinos qui faisait partie de ce groupe, lui disant que lors d´une conversation avec des amis ils avaient résolu de lui demander une fois de plus si elle ne souhaitait pas abandonner « cet acte de folie (CIB : 73) », et l´idée téméraire de poursuivre son voyage. Qu´au cas où elle accepterait de rentrer à Rio de Janeiro et dans son foyer, elle pourrait compter sur leur appui pour retrouver toutes les commodités qu´elle avait perdues suite à la ruine de sa maison; ils lui proposaient encore de lui restituer ses appointements.

De leur côté, le Docteur João Mendes et le Docteur Garcia Redondo se proposent de prendre sa défense dans les journaux, et le premier s´offre pour prendre à son compte l´éducation de ses enfants. Arinos joint à sa lettre une autre lettre de D. Veridiana portant sur le même sujet. D. Veridiana supposant que Daltro se repentait de sa décision puisqu´elle avait  pleuré en faisant ses adieux à ses enfants, lui offrait, pour la troisième fois, une somme de dix mille reis pour qu´elle  retourne travailler à son école et réintègre sa maison de Rio afin  qu´elle finisse d´élever ses enfants. Elle mentionne que d´autres personnes sont prêtes à l´aider financièrement. Elle dit combien João Mendes est peiné considérant que ce qu´elle prétend faire est un suicide. Elle s´élève encore contre le fait qu´elle ait mis ses enfants dans un internat protestant et termine en disant que si elle n´acceptait aucune de ses suggestions, qu´elle accepte au moins la compagnie d´un prêtre. Daltro refuse.

Il convient de souligner que tous ces gens et d´autres encore qui disaient de semblables choses éprouvaient de l´affection pour l´éducatrice  et qu´elle  les respectait et les  considérait comme de bons amis, si bien qu´elle les remercie dans son livre sur la catéchèse. Ils l´apprécient mais aimeraient qu´elle reste dans le rang, qu´elle ne se lance pas dans des entreprises dangereuses qui, pensent-ils, ne la regardent pas. Autre personnage qui ne ménagea pas non plus ses efforts pour qu´elle rebroussât chemin, fut le sénateur Quintino Bocaiuva, parrain de la fille cadette de Daltro qu´il avait pris sous sa protection ; il écrit à Campos Salles, président de l´État de São Paulo, en lui demandant qu´il fasse cesser le tapage de la presse locale comme lui-même l´avait fait à Rio, de manière à éviter de l´encourager.

PARCOURANT LES SERTÕES

Daltro était décidée et alla de l´avant; en mars 1897, elle est à Uberaba et constate que soit ses ressources étaient insuffisantes, soit qu´elles n´étaient pas arrivées. Les animaux de trait qu´elle avait achetés ne convenaient pas et de plus, les frais de pacage étaient très élevés. Comme si cela ne suffisait pas, c´est à Uberaba qu´elle commença à être persécutée par les moines.Elle reçoit une lettre d´une amie de la capitale, Madalena Noronha, qui lui écrit que le sénateur Quintino a appris ‘‘les persécutions que lui font subir les frères de Uberaba, mais qu´au lieu d´être touché, il estimait qu´à force, celles-ci arriveraient peut-être à faire que tu rebrousses chemin (CIB : 94)’’.

Il est urgent que tu reviennes et que tu retires tes deux fils Oscar et Leobino du collège protestant, et les remettes au collège catholique fluminense. Les mêmes idées et ces mêmes demandes accompagnent Daltro tout au long de sa route divergente, sans que jamais elle ne leur donne satisfaction. L´amie l´informe encore que dans une pièce présentée dans un théâtre de Rio de Janeiro, elle ‘’apparaît couverte d´un ridicule  épouvantable, vêtue de plumes, dansant avec les indiens et leur disant des âneries‘’. Une fois de plus le très zélé sénateur Quintino intervint, s´adressa à la police et fit ‘’retirer la pièce de l´affiche, faisant interdire le spectacle (CIB : 95)’’.

En novembre, Horacio Lane l´incite à partir car la saison des pluies approche, ce qui pourrait rendre le chemin beaucoup plus difficile. Il lui écrit de ne pas oublier les lettres de recommandation qu´elle emportait à Goiás. Les polémiques continuent dans les journaux, certains disant qu´elle allait mourir aux mains des sauvages, indomptables au Brésil, qu´ils avaient même réussi à échapper à toutes les tentatives d´éducation entreprises par les saints missionnaires. Il est encore temps, reviens ! Or le danger que courait Daltro ne venait pas des tribus sauvages mais bien ‘‘du couvent qui lui réservait bien d´autres pièges’’. À Palma, un promoteur de justice note dans son cahier : « Poursuivez votre chemin, madame ! Ne craignez pas la main homicide de ce dégénéré [le frère Antonio de Ganges] ‘‘lévite du seigneur’’, car toutes les grâces de Dieu vous rendront immune à toutes les misères humaines (CIB : 167) ».

“Ce que le dévouement des sauvages réussit à empêcher grâce à leur stratégie naturelle, me surveillant du regard jour et nuit, m´attachant même très souvent, lorsqu´ils craignaient quelque piège, au haut des arbres  pendant qu´ils dansaient et chantaient autour d´un feu de bois pour dévier l´attention des assassins qui me poursuivaient sans relâche (CIB : XIX)’’

Une autre fois, alors qu´elle venait d´être prévenue que deux assassins la suivaient, elle répondit avec calme au vacher qui la mettait en garde : ‘’Je n´ai pas peur. Dieu est avec moi et les indiens sauront m´en délivrer comme ils l´ont déjà fait des centaines de fois (CIB : 267)’’. Le danger planait sur les chemins dans lesquels elle s´enfonçait; pour ne pas être identifiée par les assassins elle en vint même à retirer de ses propres mains les obturations en or de ses dents.

“D. Deolinda a couru de nombreux grands périls  et éprouvé bien des difficultés dans notre sertão où sont menées à son encontre de terribles persécutions, inoculant dans l´esprit des pauvres habitants l´idée de la tuer et pour cela propageant de toute part qu´elle était l´Anti-Christ, que l´argent reçu de ses mains se transformerait en feuilles sèches (CIB : 149).

En janvier 1899 elle est à Goiás, en mai à Conceição do Araguaia, dans l´État de Pará. En route elle rencontra aussi des gens qui l´aidèrent, certains au prix de leur vie, rapporte-t-elle. Elle rendit visite à divers peuples indigènes et constata qu´ils n´avaient fait aucun progrès bien qu´ils relèvent du régime de la catéchèse. Elle dénonça plusieurs moines comme étant des fricoteurs, des profiteurs qui empochaient les subventions sans même connaître les villages. ‘’Les frères qui, sur les rives des fleuves Araguaia et Tocantins, ne cherchent qu´à enrichir les coffres de leurs ordres, faisant des indiens les instruments de leurs desseins et de leurs intérêts parfois infâmes (CIB : 375)’’. On disait que même pour la communauté catholique locale, ils ne servaient à rien.  

Elle en conclut que, comme on le disait en ville,  les conditions de vie des tribus n´étaient pas bonnes et qu´il fallait donc faire quelque chose. Elle décida de fonder une colonie sur les rives du fleuve Araguaia, près de Leopoldina, presqu’à la frontière de l´État de Pará, ‘‘immédiatement sous les yeux du gouvernement de Goyaz où il n´y a ni catéchèse, ni missions religieuses (CIB : XIX)’’. On perça alors de larges rues symétriques, puis un ranch fut construit ainsi qu´une école où sont inscrits 82 indigènes dont ‘’je possède les noms dans mes archives’’. Elle donne le nom de ‘’Colonie Joaquim Murtinho‘’ à cette grande ‘’République’’ indigène.

Elle manque de moyens pour  terminer les travaux et  se résout alors à  rentrer à Rio pour  trouver des fonds. Je revins ‘‘de ma téméraire excursion dans les villages indigènes des rives de l´Araguaya, du Tocantins, des sertões de Goyas et de Mato Grosso où je demeurai presque cinq années à faire des recherches et à étudier, tout en enseignant et souffrant (CIB : XVII)’’. Elle avait parcouru quelques deux mille lieues.

LA VILLE TRAVERSÉE DE BOUT EN BOUT

Rio de Janeiro, d´où elle était partie en véritable héroïne, ne la reçoit pas comme telle, ‘‘je me retrouvais prise dans une atmosphère lourde d´indifférence et de froideur et, par la suite, la cible d´une grêle de quolibets  provenant de toutes les classes sociales et principalement de la presse par laquelle ils cherchèrent à me blesser et à m´anéantir (CIB : XVIII)’’. En se livrant ‘‘jésuitiquement’’ à un travail efficace de démolition de son nom, ses ennemis de la ville vont parvenir à faire ce que le dévouement des sauvages était parvenu à empêcher, précise-t-elle. 

Durant des années Daltro tentera d´être nommée catéchiste laïque d´un village indigène, elle n´y parviendra jamais, de même qu´elle ne parvint pas à réunir les fonds nécessaires pour retourner à Araguaia et poursuivre l´œuvre de la Colonie. Cependant un groupe d´indiens envoyés par Sepé arrive à Rio venant la chercher. Ils sont rapidement emprisonnés et ils alimentent à nouveau les pages des journaux.Elle va à leur rencontre, réussit à les amener chez elle et durant des années les éduque pour en faire des citoyens et prouver qu´ils pouvaient apporter leur contribution à la nation. Elle le fait avec ses propres deniers, au prix ‘’de sacrifices matériels et de souffrances morales extrêmes’’, parce qu´elle continue à être victime de moqueries et de quolibets, comme par exemple dans les caricatures, dans la presse et dans le livre de Lima Barreto, Numa e a Ninfa (Numa et la Nymphe) de1915.

Sept indiens restent à ce moment-là avec elle en ville, ils ont connu la faim et de multiples difficultés ; elle s´attelle à la tâche, écrit, fait appel à toutes les ressources possibles de l´intelligence pour que face à un tel désarroi ils ne périssent pas dans le plus complet dénuement. ‘’Pas un seul jour je ne perdis courage’’. Jamais elle ne reçut la moindre aide, et éduqua en tout quinze indiens, leur enseignant à lire et à écrire, veillant sur leurs droits civils et politiques. Daltro parcourt la ville avec les indiens, ils comparaissent aux solennités, sont invités au Jockey et la presse souligne que ce sont ‘’des indiens du Brésil élégant’’. C´est pour cela qu´ils pouvaient apparaître au vu de tous. La seule chose qu´ils ont d´extraordinaire, c´est leur chevelure, au reste très bien soignée. Leurs détracteurs ignorent [...] que ces cheveux ont une raison d´être [...] ils sont la preuve que le ‘caboclo’, l´ indien, ne se confond toujours pas avec le blanc (CIB : 489)’’.

Elle leur enseigna des professions. « Je me suis adressée à tous les magistrats qui se succédèrent dans la patriotique mission de gouverner la Nation; à tous les congrès de notables y compris le congrès Pan-Americain; aux sociétés philanthropiques et à tous les pouvoirs de la République [...] en demandant, implorant même, protection pour ces pauvres brésiliens propriétaires spoliés de ce pays, et presque toujours la réponse n´était que mépris, moqueries, rires (CIB : XXV)’’.

L´affirmation personnelle, une certaine agressivité afin de s´imposer, tout ce qui caractérise ‘‘l´action significative’’ masculine devient monstrueuse chez les femmes, parce que non féminine et c´est ainsi que dans les dessins des caricatures ou sous la plume des auteurs satiriques,  pullulent les femmes monstres qui désobéissent aux règles. Il suffit de se rappeler de Mary Wollstonecraft que l´écrivain Horace Walpole appelait ‘’la hyène en jupon’’, expression qui combine deux aspects des attaques misogynes, ce qui affirmait que les mots et les actions chez les femmes n´étaient que distorsions  ou  étaient détruites et combattues dans des phrases exemplaires et caricaturales.

Daltro présente ses idées au professeur d´Anthropologie du Musée National, en vue de fonder une société protectrice des indiens. Il se propose de l´aider en la présentant à l´un des membres de l´IHGB, mais alors elle ne peut présenter ses notes du fait qu´elle est une femme, et les membres présents aux diverses réunions auxquelles elle comparaît finissent par s´allier à la faction religieuse. Daltro et son groupe d´indigènes allait à tout ce qui pouvait être congrès, réunions ou autres fêtes. Parfois ils étaient bien reçus, comme par exemple lors du congrès panaméricain de 1906, lorsqu´elle remet à Joaquim Nabuco une lettre et  que celui-ci dira plus tard avoir trouvé ce groupe très intéressant.

En 1906, elle participe à l`Union Civique Brésilienne (União Cívica Brasileira) pour orienter une expédition à destination de la ville de Bauru où des conflits opposaient les fronts d´expansion et les indiens Kaingang. Elle fit plusieurs discours au siège de l´association où elle affirma l´importance du travail d´incorporation de l´Indien dans la société et d´empêcher les massacres. Lors d´une réunion au Cassino Hespanhol, elle fonda cette même année une association qui avait pour objectif d´incorporer l´Indien à la République (CIB :481). Ce travail d´agitation mené par Daltro s´intensifia à partir du second semestre  1908 : elle fonda l´Association de Protection et d´Aide aux Indiens du Brésil (Associação de Proteção e Auxílio aos Silvícolas do Brasil).

En 1909, parallèlement à ce combat, Daltro fonde une association de défense des droits des femmes ’’à sept heures du soir du vingt-trois décembre 1909, dans la salle  donnant sur la rue, du second étage de l´immeuble numéro soixante-dix-sept de la Place Tiradentes, en présence de mesdames: Leolinda de Figueiredo Daltro [elle liste les noms de toutes les présentes ]. Je viens devant cette illustre assemblée féminine – LA PREMIÈRE À CE JOUR DANS NOTRE PAYS, exposer mes projets et mes idées, dans l´espoir de réussir à les faire partager à mes dignes compatriotes ! (IFB : 6)’’.

En 1910, elle participe au Premier Congrès Brésilien de Géographie, dans la commission ethnographique. Une fois de plus elle est empêchée à la dernière minute de présenter son rapport ; elle rédigea alors un mémoire où elle proposa que le congrès recommande la catéchèse laïque et sa proposition fut finalement acceptée (CIB : 548). La fondation du Parti Républicain Féminin date de cette même année. Daltro se bat en faveur du vote féminin et est présente,  toujours accompagnée d´un groupe de collaboratrices, à toutes les consultations faites sur cette question. Dans la même veine, elle organise une manifestation regroupant  plus de cent femmes et se porte candidate à député à la Constituante de 1934; elle n´est pas élue. Sur les prospectus de la campagne est imprimé son portrait,  celui d´une vieille femme de noir vêtue, portant un chapeau (Mott : 1986).

En 1911, elle fonda l´École des Sciences des Arts et des Professions Orsina da Fonseca dont elle devint directrice; la première École d´Infirmières laïques du Brésil, de la Croix Rouge et du Club Tiro Rosa da Fonseca. Durant la première guerre elle mobilisa un bataillon féminin aux uniformes rustiques, qui s´entraînait fusil en main sur un terrain de Santana (Mott : 1986). 

‘‘ Il est clair que le style de l´action politique de Leolinda Daltro  était particulier. Elle envahissait des espaces exclusivement masculins, s´exposait personnellement aux critiques cherchant toujours à attirer l´attention de la société sur les inégalités et les injustices ’’, résume bien Marques (2009 :454).

Leolinda Daltro mourut en juin 1935 dans un accident d´automobile.

L´écrivain Cora Coralina, qui habitait une maison de Rio Vermelho dont les rives furent parcourues par Daltro, écrivit en 1911 en visitant une exposition organisée par elle à l’École Orsina da Fonseca :

‘‘ Elle me paraît être la plus extraordinaire figure de femme qui ait voyagé [...] Leolinda Daltro ne parcourut point la vétuste Europe lors de conventionnelles villégiatures, ne traversa pas les vastes océans dans le confort d´un transatlantique moderne pour fouler une fois de plus ‘‘la terre sainte ‘’et baiser une fois de plus des reliques banalisées par les explorations des ‘’touristes’’, pas plus qu´elle ne gravit l´Himalaya ou ne traversa les déserts dans quelque caravane arabe [...]

Elle fit tout cela et plus encore en traversant à pied la vaste zone du Brésil central, plus ignorée que l´intérieur de la Mongolie, traversa des fleuves inconnus, grimpa et descendit des montagnes, pénétra  d´épaisses forêts [...] (CIB :606)’’.

(traduction Pierre Clemens)

Références

Butor, Michel.    .Le génie du lieu. Paris: Grasset

Daltro, Leolinda.1920 Da catechese dos indios no Brasil. Rio de Janeiro: Typ. Escola Orsina da Fonseca, [CIB]

____________.  1918 inicios do feminismo no Brasil. Rio de Janeiro: Typ.    Escola Orsina da Fonseca[IFB]

Cagliari, J.Mauro , 1989..O indígena e a República. SP:Huicitec

Kaplan, Caren. , 1996  .Questions of Travel. Duke University Press.

Marques, Teresa Cristina N. 2009, “Elas também desejam participar da Vida   Pública” in Piscitelli e ali (orgs). Olhares Feministas.

Brasilia:Unesco/Mec,pp.437-464. Mott, M.Lucia B. 1986. Calendário: Mulheres brasileiras: participação Política    e Social. SP: Conselho Estadual da Condição Feminina,

Sevcenko, Nicolau. 1992..Orfeu extático na metrópole. São Paulo: Companhia            das Letras,

Telles, Norma.2003,  “Medeia Sertaneja” in Izabel Brandão & Zahidé    Muzzart (org) Refazendo nós. Florianópolis: Editora

Mulheres, pp.147-160.

Note biographique

Norma Telles est historienne, diplômée maître en anthropologie et docteur en --sciences sociales par la PUC de SP où elle fut professeur de 1978 à 2006. Ses recherches portent sur les écrivains femmes au Brésil au XIX ème siècle , elle a publié divers articles sur ce même thème, spécialement sur la récupération et l´oeuvre de Maria Benedita Bormann(Délia). Actuellement ses recherches et ses écrits portent sur les femmes voyageurs, les femmes artistes et leur art. Auteur entre autre de ‘’A escrita como prática de si(2009)’’ (‘’L´écriture comme pratique de soi ’) ; ‘’Estrelas na areia(2010)’’,  (’’Étoiles dans les sables’’) ; ’’Fios Comuns(2010)’' (Fils communs).

 

 

labrys, études féministes/ estudos feministas
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