labrys, études féministes/ estudos feministas
julho/ 2016- junho 2017 /juillet 2016-juin 2017

 

Éditorial

 

Quinze ans depuis la première parution de Labrys. Des centaines d´articles qui ont diffusé la recherche et l´intervention féministe dans le social.

Quinze ans qui ont vu la propagation du mot « féminisme », sans que toutefois, il y ait eu une vraie asphyxie du patriarcat. Au contraire.

Le patriarcat, ce monstre aux millions de tentacules se renouvelle à chaque coup porté par le féminisme à son pouvoir outrancier. Sa stratégie est d´utiliser le féminisme et les féministes pour seconder son emprise sur le social : le cas de la prostitution est exemplaire, car de nos jours ce sont les féministes qui appuient le système prostitutionnel – cette abomination- sous prétexte «  d´agentivité » des femmes prostituées, qui ne sont, en fait, que des objets vendus et échangés pour une consommation sans bornes. La pornographie, de plus en plus répandue, expose et utilise les corps des femmes pour stimuler des virilités exacerbées ou en détresse.

Cette condescendance vis-à-vis du pouvoir mâle sur les corps des femmes, souscrit l´appellation « travail » pour une activité qui détruit les corps et le psychisme des femmes. Il est inutile de penser les femmes soumises à la prostitution en tant que sujets à part entière, car elle ne sont que chair dans l´abattoir des pulsions malsaines des hommes.

Si on entend parler plus de féminisme qu´auparavant, la puissance du mouvent disparaît maintes fois dans les « compromis raisonnables » qui entretiennent le statut quo de l´ordre patriarcal. C´est ainsi que le sexe et la sexualité prennent des tournures de « libération » sous l´égide d´une hypersexualisation qui oblige les jeunes filles à s´exposer et se rendre disponibles pour être acceptées dans les groupes d´adolescents.

Le désir qu´avait le féminisme de casser les structures patriarcales liées au biologique s´estompe et se transforme en « féminisme gentil », « pós-féminisme » ou d´autres appellations qui ne font qu´effilocher la signification profonde du féminisme : la recherche et la destruction des paramètres patriarcaux qui s´instaurent en système et contrôlent le social.

C´est ainsi que la violence contre les femmes s´accroît dans toutes ses formes et tous les domaines, qu´ils soient matériels, symboliques ou représentationnels. La force brute, les coups, l´assassinat sont le pendant à l´infériorisation constante du travail et des capacités des femmes. Dans l´imaginaire, elles continuent d´être fragiles, incapables, incompétentes, subalternes.

Ce « post-féminisme » qui prône la fin de la lutte et des revendications féminines, « car tout est déjà conquis », plaît beaucoup aux hommes car il est la déroute du féminisme radical, celui qui leur faisait peur, puisqu´il voulait extirper les contraintes et la domination patriarcales.

On entend tous les jours dans les discours sociaux les voix patriarcales des hommes politiques, des religieux, des instituteurs, des académiciens, qui veulent le retour à la soumission, au contrôle des corps féminins, telle l´éternelle interdiction de l´avortement. Il y en a même qui veulent nous apprendre ce qu´est est le féminisme, comment être féministe.

La condescendance masculine qui se manifeste par le viol, la culpabilisation des femmes ainsi attaquées, les assassinats qui se comptent par minutes, est la preuve évidente du besoin d´un féminisme de plus en plus agressif, vindicatif, qui ne se laisse pas berner par une prétendue connivence masculine. Un féminisme qui prône toujours et encore la liberté vis-à vis des stéréotypes, la citoyenneté, la construction d´un sujet politique apte à diriger, inventer, créer et surtout rompre les liens et les limites imposées par un biologique déguisé en « naturel » instrument chéri du patriarcat..

bonne lecture

 

labrys, études féministes/ estudos feministas
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