labrys, études féministes/ estudos feministas
juillet/ décembre 2008 -julho/dezembro 2008

 

Le masculinisme : son histoire et ses objectifs[1]

Mélissa Blais et Francis Dupuis-Déri

Résumé: Depuis quelques années, l’idée que les hommes vont mal gagne des adeptes. Cette prétendue crise de la masculinité aurait une cause : les femmes en général et les féministes en particulier. Au-delà de cette rhétorique, c’est un véritable mouvement social «masculiniste» qui se déploie en Occident, et au Québec. Cet essai dresse un court historique du mouvement, analyse ses particularités contemporaines (qui sont les acteurs de ce mouvement, leurs idées et leurs actions), et évalue sa logique politique, à l’aide de la théorie du sexage de Colette Guillaumin.

Mots-clés: masculinisme, mouvement social, Québec

Aujourd’hui, on retrouve en majorité ou parfois uniquement des hommes à la direction de l’État et des grandes villes, des entreprises publiques et privées, des institutions universitaires et religieuses, et même des organisations criminelles comme la mafia et les gangs de rue. Les hommes sont en général plus riches que les femmes, occupent des emplois plus prestigieux et disposent de plus de temps libre. À l’inverse, on retrouve en majorité des femmes dans les emplois mal rémunérés et elles consacrent encore plus de temps que les hommes aux tâches (non salariées) domestiques et parentales. Les femmes ont en général moins d’argent que les hommes. Elles sont la cible de la violence la plus brutale entre les sexes, soit dans leurs relations intimes, soit dans l’industrie de la pornographie et de la prostitution. Malgré le discours largement répandu de «l’égalité-déjà-là» (Delphy 2004), et celui plus agressif du «féminisme-qui-est-allé-trop-loin», force est de constater que le patriarcat — soit la domination, l’oppression et l’exploitation de la classe des femmes par la classe des hommes — est encore bien vivant, même s’il est vrai que les féministes ont réussi des avancées importantes, au prix de longues luttes.

Depuis quelques années, l’idée que les hommes vont mal et qu’ils vivent une crise d’identité gagne des adeptes au Québec et ailleurs en Occident. Cette prétendue crise de la masculinité aurait une cause: les femmes, et surtout les féministes, qui domineraient la société québécoise d’aujourd’hui, alors que les hommes, déchus, seraient relégués dans des rôles de subalternes. Les chaînes de télévision diffusent des documentaires et des émissions spéciales à ce sujet. Des lettres paraissent dans les journaux. Un conseiller municipal propose l’adoption, par la Ville de Montréal, d’une «Journée de l’homme». Des activistes déguisés en superhéros grimpent sur des ponts pour y déployer des banderoles frappées du slogan «Papa t’aime!».

Des partisans de la «cause des hommes» engagent des poursuites judiciaires contre des professeures, des militantes et des journalistes féministes. Des sites Internet, qui dénoncent le féminisme et appellent les hommes à se mobiliser, se multiplient. La situation est si grave, à en croire le psychologue et sexologue Yvon Dallaire (2001 : 29), que «nulle part il ne reste de territoire qui ne soit pas envahi par les femmes, sauf peut-être la collecte des vidanges». Une telle affirmation ne fait pas figure d’exception. Serge Ferrand (2003 :27) laisse entendre que «[c]omme territoire masculin, il n’y a plus grand chose. Les femmes ont des gyms pour femmes seulement, des clubs féministes, et des tas de programmes adaptés à leurs besoins... et on trouve ça normal. Mais, nous, il nous reste quoi? Les clubs de danseuses et les urinoirs !» André Gélinas (2002 : 138-139) insiste: «Un des premiers exploits du mouvement féministe a été, sans conteste, la fermeture des tavernes pour la seule raison qu’elles étaient inaccessibles aux femmes. [...] En tuant les tavernes on a tué un symbole, on a émasculé le Québécois.»

Ces déclarations en apparence farfelues ne sont pas énoncées par des individus excentriques et isolés. Yvon Dallaire a enseigné à l’Université du Québec à Montréal, présidé le congrès Paroles d’hommes à l’Université de Montréal, publié plusieurs ouvrages au Québec et en France et il est régulièrement interviewé dans les médias de masse, dont des magazines féminins et la chaîne publique de Radio-Canada. Serge Ferrand est un documentariste dont l’un des films sur la condition masculine a été diffusé à la télévision de Radio-Canada et il est l’auteur de plusieurs livres (publiés par la maison d’édition d’Yvon Dallaire, Option santé). André Gélinas a été professeur en science politique à l’Université Laval, directeur des études à l’École nationale d’administration publique du Québec et directeur de recherche au ministère de la Justice. Il est l’auteur du livre L’équité salariale et autres dérives et dommages collatéraux du féminisme au Québec et l’un des fondateurs du magazine électronique Homme d’aujourd’hui.

Ces hommes d’influence s’affolent devant certaines transformations culturelles, politiques, économiques et sociales. Ils oublient toutefois d’admettre l’évidence, soit que le pouvoir réel se situe dans des lieux encore contrôlés en grande majorité par des hommes (ministères, conseils d’administration des grandes compagnies, etc.). Contrairement à la rumeur, les ressources publiques et privées pour personnes en difficulté ne sont pas destinées qu’aux femmes. Les hommes ont accès, comme les femmes, aux divers services publics et privés comme les hôpitaux, les cliniques de santé et les lignes d’aide téléphonique. Les hommes ont en général plus aisément accès à des services d’aide privés, comme des psychologues, puisqu’ils ont plus d’argent que les femmes et des emplois bonifiés de meilleurs avantages sociaux. Enfin, il existe des ressources pour hommes seulement, comme des maisons d’hébergement pour toxicomanes ou itinérants ou pour pères séparés et des centres pour hommes violents. De plus, des campagnes de prévention et d’aide portent une attention particulière aux besoins des hommes, dont celles sur le suicide (Dupuis-Déri 2008). Nos chantres de la cause des hommes oublient également de mentionner le très grand nombre d’institutions de socialisation et de solidarité dont disposent les hommes, comme les équipes sportives et autres fraternités, ainsi que des organismes tels que le Réseau Hommes Québec où les participants peuvent discuter de masculinité et recevoir de l’information au sujet de leurs droits en situation de divorce.

S’il apparaît aisé d’analyser le caractère antiféministe du masculinisme ainsi que ses contradictions dans le discours, il n’en demeure pas moins que ce mouvement réactionnaire a su acquérir une certaine crédibilité auprès de dirigeants qui s’inquiètent aujourd’hui des hommes « en crise ». En vue de mieux saisir ce phénomène social, cet article dressera un court historique du mouvement et en présentera ses acteurs et leurs idées et actions. Finalement, nous analyserons le masculinisme dans sa mécanique de contrôle des femmes, à l’aide de la théorie du sexage de Colette Guillaumin (1992).
Qu’est-ce que le masculinisme?

Il n’y a pas de consensus quant à l’appellation à donner à ce mouvement des hommes. Certains rejettent l’étiquette de «masculiniste», lui préférant celles d’«hoministe» ou d’«humaniste » (Trottier 2007 : 171 ; Dallaire 2001 : 21). Le responsable du site Internet Entregars explique ainsi la problématique:
Certains hommes disent utiliser «hoministe» parce que «masculiniste» possède une connotation négative aux yeux de plusieurs, surtout les féministes. Ce sont d’ailleurs les féministes qui se sont appropriées le terme «masculiniste» et se sont dépêchées à y accoler une perception négative. Je crois qu’il est beaucoup plus constructif de réhabiliter le qualificatif «masculiniste» que d’en utiliser un autre et diviser le mouvement, diluer les forces. [...] Le masculinisme doit devenir l’équivalent — aux yeux de tous et toutes — du féminisme et être considéré positivement .
Comme il semble impossible de trouver une étiquette acceptée par toutes et tous pour désigner ce phénomène, nous retiendrons ici le terme général de «masculinisme» pour nommer ce mouvement social.

Pour plusieurs, le masculinisme ne constitue pas un véritable mouvement social, et ne serait composé que d’un ensemble disparate et non structuré d’individus peu sérieux, plutôt isolés et marginaux, et même psychologiquement déséquilibrés, à qui il ne faudrait pas accorder trop d’attention. Pourtant, cette mouvance englobe un ensemble d’individus et de groupes qui œuvrent à la fois pour contrer le féminisme et pour promouvoir les privilèges et le pouvoir des hommes. Elle s’exprime à plusieurs voix par des livres, des sites Internet, des textes publiés dans les médias et des mémoires déposés en commission parlementaire, ou lors de colloques et dans des documentaires sur la «condition masculine». Elle compte aussi des intellectuels en qui elle se reconnaît, et surtout des militants qui pratiquent le lobbying auprès des ministères et des politiciens ou mènent des actions directes symboliques ou de perturbation. Les thèses de ce mouvement sont défendues dans les médias, dans des films grand public, mais aussi de plus en plus dans les départements universitaires de psychologie, de travail social et de sexologie. En bref, cette mouvance constitue ce qu’il est convenu d’appeler un mouvement social, et apparaît en ce sens comme une force politique qui s’oppose au féminisme.

Il existe une grande diversité de mouvements sociaux, dont le mouvement féministe, étudiant, écologiste et pacifiste. Il y a des mouvements sociaux progressistes et d’autres plutôt conservateurs ou réactionnaires, comme le mouvement néonazi. En fait, ce n’est pas la légitimité de la cause qui définit un mouvement social, mais ses diverses composantes. Sept composantes sont nécessaires pour qu’il soit possible de parler d’un mouvement social: il doit y avoir (1) des militants ou militantes qui forment (2) des organisations (comités, associations, réseaux, journaux, etc.) et qui affirment (3) représenter une identité collective (comme les femmes, les étudiants, les hommes) et (4) défendre une cause commune, qui peut changer au fil du temps. Ces militantes ou militants s’engagent également en politique (5) sur le mode du conflit, s’opposant à des adversaires et adoptant (6) une posture protestataire, voire perturbatrice, (7) en vue d’influer sur les rapports sociaux, soit pour changer le système social, ou pour le préserver «devant ce qui menace de le dégrader» (Mathieu 2004 : 17-25 ; Rocher 1997 : 505-512).

Dans ce dernier cas, le mouvement social est réactionnaire, plutôt que progressiste. Ainsi entendu, le masculinisme est bel et bien un mouvement social dont les membres partagent des idées et valeurs communes, malgré des visées tactiques disparates et une certaine hétérogénéité interne qui s’incarne dans diverses tendances plus ou moins radicales. Le masculinisme est une des formes que prend l’antiféminisme, soit un discours prétendant que les féministes et les femmes dominent une société dans laquelle les n’ont plus de rôle significatif à jouer. Le masculinisme récupère à son profit l’analyse et le mode d’organisation des féministes pour en renverser le sens: l’analyse des rapports sociaux de sexe cherche maintenant à identifier les hommes comme victimes des femmes dominantes, la notion de matriarcat remplace celle de patriarcat, et les hommes sont appelés à se joindre à des groupes d’hommes qui ressemblent aux groupes de prise de conscience mis sur pied par les féministes dans les années 1960 et 1970. Comme les féministes, les masculinistes proposent aux hommes de (re)développer leur capacité d’action et leur pouvoir, qu’ils auraient perdus au profit des femmes.

Le chercheur québécois Jean-Claude St-Amant, de l’Université Laval (Québec), explique: «Oui, il y a des discriminations sur la base de la classe sociale où des hommes sont aussi victimes, mais ils ne le sont pas en tant qu’hommes. Donc à partir de concepts détournés de leur sens, les "masculinistes" se sont donné une légitimité, en disant par exemple, il y a du "féminisme", pourquoi pas du "masculinisme", il y a une condition féminine, donc il doit y avoir une condition masculine .» En d’autres termes, ce mouvement ne porte pas, comme le féminisme, un projet de justice et d’égalité. Le mouvement masculiniste a pour objectif général de contrer l’émancipation des femmes. En ce sens, le masculinisme pourrait être considéré comme un «contre-mouvement», pour reprendre une notion propre au champ d’étude des mouvements sociaux en sociologie et en science politique. Cette notion de «contre-mouvement» renvoie à l’idée de «contre-révolution»: chaque fois qu’il y a un vaste mouvement d’émancipation, les anciens maîtres se mobilisent pour contre-attaquer.
Le masculinisme dans l’histoire occidentale

Avant l’apparition du mouvement masculiniste à l’époque contemporaine, des masculinistes se sont exprimés à plusieurs reprises depuis quelques siècles. Au côté des antiféministes cléricaux, par exemple, des masculinistes parlent de crise de la masculinité à des moments où des femmes s’organisent pour bousculer les rôles et les rapports de sexe. Ces mobilisations de femmes surviennent souvent lors de périodes où des transformations dans la sphère politique ou économique modifient les rapports entre hommes, comme entre les nobles et les bourgeois, ou encore entre les patrons et les employés.

Quelques rares études, dont L’identité masculine en crise au tournant du siècle, d’Annelise Maugue (2001), ont documenté les précédentes «crises de la masculinité», qui toutes se doublaient d’un ressac contre les femmes. Déjà, dans la période turbulente de la Révolution française, des éléments du discours masculiniste se manifestent (Lampron 2008). Les femmes sont accusées de se masculiniser et de menacer la distinction entre les sexes et la cohésion de la nation. Pourtant, la Révolution française ne s’accompagne pas d’une émancipation des femmes, loin s’en faut: les républicains qui renversent la monarchie et s’emparent du pouvoir interdisent aux femmes de voter et d’être élues, de porter les armes, de former des clubs et même de s’assembler à plus que cinq sous peine d’emprisonnement.

Il convient par ailleurs de souligner qu’au fil de l’histoire européenne et américaine, des bouleversements socio-économiques modifièrent les pourtours des clivages existants dans la classe des hommes et entraînèrent, par la même occasion, plusieurs problèmes. Ceux-ci ne sont pas le propre des soi-disant victoires du féminisme, mais des transformations, par exemple, du système capitaliste. Aux États-Unis, un discours sur la «crise» de la masculinité apparaît vers la fin du XIXe siècle, alors que les hommes connaissent une profonde transformation de leur identité économique: près de 90% des hommes sont des travailleurs indépendants dans les années 1860, soit des fermiers, des artisans ou des commerçants. À peine une génération plus tard, ils sont moins de 35% à être indépendants. Parallèlement au processus accéléré d’industrialisation, survient une véritable «panique morale au sujet de la masculinité», face à une prétendue perte d’importance de la musculature par l’introduction au travail de nouvelles machines. Pour (re)valoriser la masculinité viriliste, des hommes mettent sur pied des associations pour garçons, comme les scouts.

Certains prétendent que «l’habileté mécanique» est un attribut masculin, justifiant ainsi l’exclusion des femmes des emplois en manufactures (Paterson 2007 : 48). L’Europe aussi est traversée par des discours sur la crise de la masculinité, en Allemagne et en France en particulier, vers le début du XXe siècle. Des études et des romans y présentent les femmes exerçant les rôles masculins traditionnels, alors que les hommes seraient condamnés à préparer «les confitures et les cornichons», voire à donner le sein aux bébés. Ce discours de la «crise» de la masculinité trouvera cependant moins d’adeptes puisque l’exaltation de la virilité masculine sera valorisée à l’occasion de la boucherie que fut la Première Guerre mondiale et par la montée du nazisme porteur de l’image hypervirile du héros aryen (Maugue 2001 ; Badinter 1992 : 24-41 ; Le Rider 1992).

Le mouvement masculiniste contemporain émerge dans les années 1980 en Occident, soit à un moment historique marqué par un ralentissement ou même un recul de plusieurs mouvements progressistes (dont le mouvement syndical et le mouvement souverainiste au Québec), un durcissement du marché du travail qui fragilise les conditions matérielles de nombreux travailleurs et travailleuses et un retour en force du conservatisme (Margaret Thatcher en Grande-Bretagne, Ronald Reagan aux États-Unis, Brian Mulroney au Canada). Ces trois phénomènes vont attiser le mécontentement de plusieurs hommes et pousser certains d’entre eux à s’organiser. L’antiféminisme, comme le racisme, entre donc en résonance avec d’autres dynamiques socio-économiques et politiques, qui exacerbent sa virulence. Ainsi, le racisme comme l’antiféminisme sont généralement moins violents lorsque les hommes hétérosexuels à la peau blanchâtre savent profiter dans diverses sphères de leur vie de reconnaissance, de services et de biens matériels. Par contre, ils cherchent à maintenir, voire retrouver des privilèges, quand l’économie décline et que leur condition socio-économique se détériore ou n’est pas à la hauteur de ce à quoi ils estiment avoir droit. On ciblera alors les immigrants et les immigrantes, les accusant de «voler» le travail des nationaux, ou encore les femmes, dont les percées dans l’espace public priveraient les hommes de la place qui leur serait due.

Le discours antiféministe décliné sur le mode masculiniste semble donc d’autant plus cohérent et logique qu’il fait écho à des inquiétudes concrètes et qu’il est au diapason des mouvements conservateurs particulièrement forts et influents à partir des années 1980 en Amérique du Nord. Cette cristallisation de la colère et du ressentiment de certains hommes contre un bouc émissaire a des avantages politiques pour les dominants (Lamoureux 2008). Blâmer les femmes permet de détourner la colère de la masse des hommes vers les femmes, évitant ainsi qu’ils ne confrontent les patrons ou les idéologues et politiciens néolibéraux qui sont en fait les vrais responsables de la dégradation de la situation. Cela dit, cette théorie du bouc émissaire n’explique pas tout, car le masculinisme est avant tout un mouvement qui s’oppose aux féministes dans le but de préserver les privilèges masculins.


Le mouvement masculiniste contemporain

Les années 1960 et 1970 au Québec sont marquées par de fortes mobilisations féministes, qui aboutissent à une série de percées sur le front de l’éducation et du travail, à une plus grande liberté amoureuse (réforme du droit au divorce), au contrôle par les femmes de leur corps (contraception, avortement) et à la mise en place de réseaux féministes et féminins, comme la Fédération des femmes du Québec (FFQ) et les centres d’hébergement pour femmes violentées. Des hommes vont critiquer le féminisme, mais c’est seulement vers les années 1980 que commencent à poindre les premiers signes du mouvement masculiniste. Certains prennent alors la parole publiquement pour dire que les hommes sont confus et qu’ils n’ont plus de repères à cause de l’influence des féministes. Michèle Le Doeuff (1989 : 55), qui est l’une des premières francophone à utiliser la notion de «masculinisme» pour «nommer ce particularisme qui non seulement n’envisage que l’histoire ou la vie sociale des hommes, mais encore double cette limitation d’une affirmation»: «il n’y a qu’eux qui comptent et leur point de vue».

En 1984, l’écrivain Georges-Hébert Germain signe dans la revue L’Actualité un article qui dépeint la situation des «hommes après 20 ans de féminisme», auquel répond dans La Vie en rose Hélène Pedneault (1988 : 47), qui parle avec cynisme des «femmes après des millénaires de masculinisme». Germain citait le psychanalyste Claude Saint-Laurent, qui affirmait que «le féminisme a créé chez l’homme une profonde insécurité et une fragilité émotionnelle qui le rendent beaucoup plus vulnérable aux maladies psychosomatiques». Germain en rajoute, prétendant — lui, l’écrivain publié dans L’Actualité — «que les hommes se sont tus [...] parce qu’ils ont acquis la certitude qu’on ne les écoute pas». Plutôt que de constater l’évidence, soit que les hommes sont encore dominants, le discours masculiniste qui émerge alors laisse entendre que les hommes se sont fait flouer par le féminisme, qu’ils doivent se reprendre en main et recomposer leur identité masculine. La féministe Rosemary Radford Ruether (1992 : 16) note, au sujet d’un mouvement similaire aux États-Unis dans les années 1980, que les problèmes des hommes ne semblent pas résider dans les salles de réunion où ceux-ci prennent des décisions afin de conserver le pouvoir et les richesses...

Non, les problèmes des hommes prennent racine dans leur enfance, dans la famille où l’enfant mâle serait privé d’une figure paternelle et serait dominé par une mère forte. La solution aux problèmes des hommes serait de revivre cette lutte adolescente pour se libérer de la mère et retrouver le père absent. En réclamant une psyché masculine forte, les hommes pourront guérir leur identité masculine blessée. Point n’est besoin d’aucune analyse qui montrerait pourquoi la famille est structurée de telle sorte que le travail domestique est principalement à la charge de la mère. Personne ne replace cette structure familiale dans le contexte plus large du pouvoir public masculin. Les hommes du mouvement des hommes ne semblent pas être conscients que ces structures façonnent la famille. Ils se présentent comme les victimes tragiques de la domination maternelle.

Au Québec, le psychologue Guy Corneau (1989 : 113, voir aussi 115) lance en 1989 un livre recevant un accueil enthousiaste, Père manquant, fils manqué, dans lequel il analyse les problèmes des hommes, dans un face-à-face entre le père et le fils. Le psychologue y dénonce la mère dominatrice et castratrice qui «s’ingénie à briser la masculinité du fils au moyen de gestes et d’arguments souvent violents» . Comme le souligne avec ironie la féministe italienne Patrizia Romito (2006 : 171), que «les pères se tranquillisent: Corneau ne va pas leur demander de participer, ni de façon égale ni au moins en partie, aux soins quotidiens de l’enfant». Pour Corneau (1989 : 32), ce qui importe, c’est que «le fils soit en contact avec l’odeur du père, qu’il entende le son plus grave de sa voix et qu’il virevolte dans ses bras». L’approche masculiniste de Guy Corneau agira donc comme une stratégie d’évitement face au mouvement féministe, qui permet aux hommes à la fois de discréditer les femmes et les féministes identifiées comme la cause de leurs prétendus malheurs, voire de la perte de leur masculinité, et de faire bloc, entre hommes, pour (re)valoriser cette masculinité perdue (Bastien Charlebois 2008).

En France, Dominique Frischer (1997 : 65) note l’émergence du mouvement masculiniste dès le début des années 1990, alors que le mouvement féministe est lui-même en crise. Selon Frischer, les médias français «accueillent à bras ouverts ceux qui brandissent l’étendard de la révolte contre la victimisation des hommes. Un thème [...] où transparaissent des relents de propagande sexiste voire raciste. À propos des hommes traumatisés par un quelconque bouleversement des schémas traditionnels, la presse en général, y compris féminine, se fait immédiatement compatissante». Le magazine Marie-Claire, par exemple, propose un dossier sur le mal-être des hommes dès novembre 1994. Un an auparavant, c’est L’Événement du jeudi (7 octobre 1993) qui proposait un dossier intitulé «Le MLH attaque», paraphrasant le Mouvement de libération des femmes (MLF) pour évoquer un mouvement de libération des hommes (d’où l’acronyme MLH). Si le responsable du dossier, Jean-François Khan, précise qu’en France «le pouvoir mâle reste inentamé», les textes du dossier entonnent tout de même la complainte des pères divorcés, critiquent un matriarcat totalitaire, et déplorent «un monde cauchemardesque borné de féminitude» qui influencerait jusqu’à la conception des carrosseries automobiles (Frischer 1997 : 66-67 ; Bard 1999 : 324-326).


Les groupes de pères divorcés

Ce mouvement est également constitué de groupes de pères séparés. Dans l’ouvrage collectif Terre des femmes: Panorama de la situation des femmes dans le monde, Marie-Josèphe Dhavernas (1982 : 324) souligne la constitution, en Europe, de tels groupes de pères qui seraient animés par une «frustration [qui] se double souvent de rancœur contre les pensions alimentaires, plus souvent vécues comme une exploitation du divorce que comme une nécessité pour élever les enfants ou une compensation pour le travail gratuit fourni durant le mariage à l’époux et aux enfants». Il semble que le premier de ces groupes soit le Mouvement pour l’égalité parentale, créé en Belgique en 1982. Le Väterauffbruch für Kinder apparaît en Allemagne en 1989 et SOS Papa en France en 1990 .

Dès 1986, la psychologue féministe Phyllis Chesler (1992 : 138-139 ; voir aussi Romito 2006 : 155-179) signe Mothers on Trial: The Battle for Children and Custody, un ouvrage qui démontre que les mères qui se battent en cour pour la garde de leur(s) enfant(s) font face au poids des stéréotypes sexistes largement partagés par les juges, les avocats et les avocates. Ainsi, une femme salariée sera accusée d’être une mère absente et égoïste; celle qui reste à la maison, d’être une parasite paresseuse; celle qui a quitté le domicile conjugal sera accusée d’être un mauvais exemple moral et celle qui vit avec un nouveau conjoint, de vouloir effacer le vrai père. L’étude de Phyllis Chesler (1992 : 137) n’a pas plu aux activistes masculinistes, qui organisent d’ailleurs des manifestations lors de ses conférences, la menacent de poursuites judiciaires et lui adressent des appels anonymes obscènes ainsi que des menaces de mort (elle a trouvé un animal mort devant sa porte). Cette mobilisation contre Phyllis Chesler survenait dans un pays où 75% des parents absents — en majorité écrasante, des hommes — ne contribuaient en rien sur le plan financier aux soins et à l’éducation de leur(s) enfant(s). Au milieu des années 1980, aux États-Unis, 40% des mères ayant demandé une pension se la voyaient refusée par un juge. Seulement 60% de celles qui recevaient une pension en touchaient le plein montant. En fait, les pères séparés étaient plus assidus dans leurs paiements de voiture qu’à l’égard de leurs responsabilités financières envers leur(s) enfant(s) (Mitchell et Goody 1997 : 207-208).

Devant le problème largement répandu de pères divorcés «oubliant» de payer la pension alimentaire, des réformes juridiques et administratives sont apportées à la fin des années 1980 et au début des années 1990 dans plusieurs pays, en vue de créer des mesures plus contraignantes, dont la perception de la pension directement à la source salariale. En Grande-Bretagne, un pays à l’avant-garde sur le front des mobilisations masculinistes, une vaste coalition se forme à l’occasion de la mise sur pied de la Child Support Agency (CSA) en 1991. La création de cette agence faisait suite au constat que 70% des parents absents (dans 90% des cas un homme) ne s’acquittaient d’aucune contribution. Les autres ne versaient en moyenne que 25$ par semaine. L’agence avait donc pour mandat de s’assurer que des pensions soient versées sur une base régulière et uniforme au parent ayant les enfants à charge, soit presque exclusivement des mères monoparentales (Mitchell et Goody 1997 : 201-202).

La coalition opposée à la création de cette agence regroupait diverses organisations, dont Dads After Divorce, le UK’s Men’s Movement, Families Need Fathers, Children and Male Parents’ Society, Men in Crisis Help-line, et certaines étant affiliées au International Men’s Movement. On retrouvait dans cette mobilisation principalement des pères absents, généralement de la classe moyenne, parfois appuyés par des secondes conjointes. En plus de leurs prises de positions publiques, ces groupes eurent recours à diverses formes d’action directe: manifestations de rue, carnaval devant la Chambre des communes, crevaisons de pneus, envoi d’excréments par la poste, menaces à des politiciens et à leurs enfants. La directrice de la CSA sera également déclarée «coupable de torture d’innocents» et ses employées identifiées comme des «membres SS».

Au Canada, les assemblées législatives procèderont à des réformes sur la loi du divorce dans les années 1980. Les provinces se dotent de lois de perception obligatoire des pensions suite à la publication d’études qui démontrent que les mères ont du mal à les obtenir de la part du père des enfants. Dès 1985, un premier comité de Fathers 4 Justice est fondé en Ontario, à Kitchener-Waterloo (Kennedy 2005 : 311). Deux ans plus tard apparaît le Canadian Council for Family Rights, une autre organisation de défense des pères divorcés (Baker 1997). Au Québec, dès le début des années 1980, l’Association des hommes séparés et divorcés du Québec (AHSD) encourageait les pères divorcés à ne pas payer de pension alimentaire afin de protester contre des ordonnances de divorce perçues comme injustes à leur endroit (Dufresne 1998 : 129). Il est à noter que malgré la réforme de la loi sur le divorce, une étude révèle qu’en 1996 les femmes qui divorcent connaissent une chute de revenu plus importante que leur ex-conjoint et que plus de 50% des mères monoparentales vivent dans la pauvreté. De plus, les juges refusent d’octroyer une pension alimentaire aux deux tiers des femmes qui en font la demande (Baker 1997 : 66 ; Lavoie 2008).

Ces débats autour du divorce et des pensions alimentaires sont particulièrement importants dans la mesure où les groupes de pères qui se mobilisent alors formeront le fer de lance du mouvement masculiniste en émergence. On retrouve dans ces regroupements les militants les plus engagés. Leurs organisations vont faciliter la structuration du mouvement social masculiniste, en lien plus ou moins formel avec des groupes d’entraide masculins de tendance psychologisante.

Au Québec, c’est toutefois un événement aussi tragique que sensationnel qui agira comme catalyseur de la mouvance masculiniste, qui, pour sa part, se constituera en véritable mouvement social dans les années 1990. Le 6 décembre 1989, des femmes qui étudient à l’École polytechnique de Montréal sont prises comme cibles par un homme, Marc Lépine, qui sera, par la suite, amplement victimisé dans les médias à grand tirage. Des experts et expertes rabrouent alors le féminisme, l’accusant d’être la source de la prétendue folie du tueur (Blais 2008).


Les appels à la formation d’un mouvement masculiniste

L’année suivante, le Comité anti-féministe de Montréal dresse une «liste des 140 injustices dont sont victimes les hommes de la part des femmes en général et des féministes en particulier», affirmant que «l’homme souffre de la cruauté mentale des femmes» (Pelletier 1990 : B3). Dix ans plus tard, un bénévole du centre de ressources pour hommes Autonhommie explique qu’«être homme aujourd’hui, c’est quasiment devenu une maladie génétique! Plein de choses nous sont tombées sur la tête en même temps depuis les années 60, dont le féminisme: peu à peu, toute la société s’est féminisée» (Halpern 2000 : 110). En novembre 2000, 400 personnes participent au premier forum québécois sur la condition masculine, organisé par ce centre de ressources de la région de Québec. Le mouvement masculiniste, qui se développe de plus en plus de manière organique, s’enracine à la fois dans les réseaux de ressourcement psychologique pour hommes (à première vue, moins politiques), dans des groupes ouvertement militants (en particulier, des pères séparés) et dans les cercles d’étude de la masculinité où circulent des spécialistes, psychologues et sexologues qui s’inquiètent de la crise de la masculinité provoquée par les avancées du féminisme.

L’appel explicite à l’adhésion à une idéologie et à un mouvement social masculinistes prend de la force au début des années 2000. André Gélinas (2002 : 12), par exemple, affirme qu’«une nouvelle pensée, le “masculinisme” (le besoin d’un néologisme est significatif) serait justifiée si l’on découvrait, par exemple, que la réalité est différente de celle que les féministes dépeignent (dont celle du fameux patriarcat familial) ou encore que, sous le couvert d’une recherche de l’égalité, les femmes ont visé et atteint une situation dominante». Gélinas (2002 : 11) est clairement pour la constitution de cette pensée masculiniste, à laquelle il participe, puisqu’il déclare aussi qu’«on ne pourrait pas parler d’un certain féminisme qui serait bon, raisonnable ou modéré et d’un autre féminisme qui serait mauvais, agressif ou excessif. À notre connaissance, il n’y a toujours eu qu’un seul féminisme». Il ajoute que «le féminisme sévit réellement depuis plus de cinquante ans dans plusieurs pays occidentaux», précisant que «la pensée féministe est devenue tellement dominante» qu’on ne peut que constater «l’envahissement du féminisme» (Gélinas 2002 : 12, 13, 163). Gélinas (2002 : 208) conclut: «Les hommes n’ont donc d’autre choix que de multiplier les associations sectorielles et les gestes de solidarité masculine».

De la France, Éric Zemmour (2006 : 131-132 et 134) se réjouit de constater qu’a émergé aux États-Unis «une vigoureuse réaction masculiniste», une «révolution masculiniste» menée par des hommes «néo-conservateurs [qui] viennent de Mars et non de Vénus» et qui participent d’une saine «revanche réactionnaire». Patrick Guillot (2004 : 152) explique, quant à lui, que le mouvement masculiniste doit amalgamer les divers courants, soit les réseaux d’aide psychologique aux hommes, les groupes activistes et les spécialistes de la condition masculine, précisant en outre que «le mouvement [des hommes] devra accueillir et soutenir les victimes masculines et en particulier les "hommes battus"». Selon lui, le mouvement des hommes «devra aussi faire pression sur les pouvoirs publics», «obtenir des médias qu’ils leur offrent un espace de parole conséquent», «continuer le combat pour la résidence alternée», «faire circuler l’information, [...] établir des contacts», «réunir des congrès internationaux» et mener «un combat nouveau» qui implique de «se nommer lui-même», soulignant que «hominisme semble adéquat». Guillot (2004 : 153-154) ajoute que «l’instauration d’une Journée internationale des hommes» serait «l’occasion d’activités et de manifestations diverses où s’expriment les nouvelles aspirations masculines».

Ainsi, le mouvement masculiniste est particulièrement actif et dynamique surtout depuis le début des années 2000. Au Québec seulement, des activistes associés de près ou de loin au mouvement masculiniste ont déroulé des banderoles sur des panneaux publicitaires, d’autres ont escaladé la croix du mont Royal (déguisé en Spiderman) à Montréal, ainsi que le pont Jacques-Cartier (à deux reprises en 2005 et une fois en 2006). À noter, la sympathie pour ces activistes, dont le geste a parfois provoqué la fermeture du pont Jacques-Cartier et des congestions de la circulation pendant de longues heures: dans les médias et les tribunes téléphoniques, plusieurs condamnent le moyen utilisé mais disent comprendre la motivation du geste... Le mouvement a aussi organisé plusieurs manifestations. Un rassemblement s’est tenu devant l’hôtel de ville de Montréal en appui à une demande d’instauration d’une Journée de l’homme, présentée par le conseiller municipal Jean-François Plante (2005). Ce dernier sera, en 2007, candidat de l’Action démocratique du Québec et critiquera le fait qu’une journée soit dédiée au souvenir du massacre de l’École polytechnique .

Des manifestations ont également eu lieu devant le palais de justice de Montréal, auxquelles participent quelques dizaines d’activistes déguisés en père Noël ou en agents d’équipes de décontamination (2004). Une cinquantaine de sympathisants du groupe Fathers 4 Justice ont marché jusqu’au parlement canadien à Ottawa en 2005. Des plaintes à la Commission des droits de la personne et des poursuites, qui ciblaient des féministes, des ministres, des juges et des avocats, ont également été déposées, au nom des droits des hommes et des pères. Enfin, des activistes associés à des groupes masculinistes cherchent régulièrement à perturber des activités féministes, dont des ateliers de discussion et des conférences, souvent à l’occasion du 8 mars, la Journée internationale des femmes. Si le mouvement n’a pas la capacité de mobiliser des milliers de personnes dans la rue, il est suffisamment dynamique pour organiser plusieurs actions, dont certaines ont une très grande portée symbolique et médiatique.

Les médias se font d’ailleurs régulièrement le relais de l’idéologie et du discours des masculinistes. De grandes chaînes de télévision, dont Radio-Canada, diffusent des documentaires comme L’homme en désarroi de Denise Bombardier et La machine à broyer les hommes de Serge Ferrand, auteur de la bande dessinée Les vaginocrates.

La production de livres à sensibilité masculiniste est très importante depuis quelques années . Il est significatif de constater que les auteurs se citent avec complaisance les uns les autres. Ils se reconnaissent ainsi une sympathie mutuelle et une identité idéologique commune. Plusieurs de ces auteurs, dont Yvon Dallaire et Éric Zemmour, sont invités dans des émissions de radio ou de télévision et sont interviewés dans des journaux et revues, ce qui accroît d’autant la portée de leur discours. Des événements à caractère masculiniste sont également organisés, comme le congrès Paroles d’hommes à l’Université de Montréal, présidé par Yvon Dallaire (2005), ou encore le colloque Comment ça va, les hommes?, organisé conjointement par La Presse et Radio-Canada, et ce, en plus des événements antiféministes qui ne sont pas directement issus du mouvement masculiniste, comme le congrès anti-choix organisé par Campagne Québec-Vie (2005).

Tout cela sans compter les dossiers et les émissions spéciales traitant de diverses thématiques liées à la «crise des hommes», comme la série radiophonique La planète des hommes, diffusée sur les ondes de Radio-Canada et reproduite sous forme de livre. Des activistes de groupes masculinistes sont reçus par des représentants de ministères clés, auprès de qui ils pratiquent du lobbying. Des porte-parole de ces mêmes groupes défendent leurs mémoires devant des commissions parlementaires, comme à la commission en vue d’étudier une éventuelle réforme du Conseil du statut de la femme (2005-2006) et à celle discutant l’ajout du principe d’égalité entre les sexes à la Charte québécoise des droits et libertés de la personne (2008). Des initiatives ponctuelles, mais très révélatrices de l’influence du masculinisme, sont également à souligner, comme l’organisation d’une journée pour garçons à l’école secondaire La Ruche, de Magog (2003), à laquelle étaient conviés des policiers et des soldats, avec leurs équipements, voitures de police ou véhicules militaires.


De plus, des masculinistes accordent une telle importance à la musculature et à la violence qu’il conviendrait presque de parler alors de mouvement musculiniste. Dans son livre Échecs et mâles, Mathieu-Robert Sauvé (2005 : 61, 65, 67) se désole qu’il n’y ait plus, selon lui, d’«authentiques héros» dans le cinéma québécois aujourd’hui, qui incarneraient «sans complexe un rôle de protecteur courageux». Mathieu-Robert Sauvé identifie ouvertement ses modèles mâles: James Bond, Daniel Boone et des acteurs comme Alain Delon, Jean-Paul Belmondo, Lino Ventura, John Wayne, Sylvester Stallone, Arnold Schwarzenegger «et autres supergéniteurs» qui «ont contribué à renforcer l’image gagnante des justiciers». Bref, des «héros agissants», «des hommes surpuissants». Dans le même esprit, Patrick Guillot (2004 : 13) rend «hommage aux hommes», à «leur force musculaire» et à sa «dimension poétique», qui serait selon lui aujourd’hui «souvent moquée, dénigrée». Malheureusement, selon André Gélinas (2002 : 11 et 163), le «rôle de protecteur de la femme» que jouent encore tant d’hommes au Québec y serait dénigré en raison d’une «vision féministe et féminisante» de la société. Le psychologue français Jacques Arènes (2005 : 139) explique, quant à lui, que le père aurait pour rôle d’apprendre à ses fils à déployer leur violence de manière responsable.

La fonction paternelle détient en effet un aspect d’aide à l’intégration de la violence dans ce qu’elle a d’indifférencié. Ce que l’on appelait la «puissance» paternelle n’était pas seulement l’effet de la domination masculine. Elle comportait aussi une dimension de vitalité, d’utilisation de l’énergie, de mobilisation vitale face aux épreuves, qui est encore bien utile. La violence des jeunes gens, des adolescents est souvent corrélée à cette impossibilité de rencontrer une «bonne» violence paternelle.
Le psychanalyste précise que «l’archétype masculin» auquel doit être identifié le père «est le combattant», le boxeur (Arènes 2005 : 137). Le discours musculiniste, obsédé par les muscles et la violence, justifie ici l’homme violent, puisqu’il lui serait naturel de régler les différends à coups de poing, comme un boxeur (Brossard 2008).


Masculinisme et sexage

 

Nous trouvons par ailleurs pertinent de réactualiser la théorie du sexage, de la féministe Colette Guillaumin (1992), pour bien appréhender le phénomène masculiniste. En résumé, Guillaumin (1992 : 16) explique que deux faits d’importance doivent marquer l’analyse des rapports de sexe: «le premier est un rapport de pouvoir [...], le coup de force permanent qu’est l’appropriation de la classe des femmes par la classe des hommes. L’autre est un effet idéologique: l’idée de "nature", cette "nature" supposée rendre compte de ce que seraient les femmes». Le mouvement masculiniste joue sur les deux tableaux. Il contribue au rapport de pouvoir et au coup de force des hommes sur les femmes, tout particulièrement sur les fronts de la violence contre les femmes, du divorce et de la garde des enfants. Il lutte également pour accroître les ressources publiques destinées aux hommes et diminuer celles attribuées aux femmes . En effet, le discours de la crise des hommes peut avoir pour effet de réduire les ressources financières dont disposent les groupes de femmes et les féministes. Jean-Philippe Trottier, auteur du livre Le grand mensonge du féminisme (2007 : 138-139), explique que les masculinistes devraient concurrencer les féministes pour l’obtention de fonds publics, « dans un contexte où l’État, endetté, sera obligé de sélectionner les clientèles à qui il octroiera des fonds », alors que les « revendications » masculinistes comptent aussi des demandes de « ressources financières [pour] aider les hommes en itinérance, les hommes victimes de violence conjugale, les pères spoliés, soutenir la recherche en condition masculine, etc. »

Le masculinisme participe également de l’effet idéologique du sexage, en renforçant par son discours la différence «naturelle» entre les sexes qui aurait été perturbée par le féminisme et qu’il conviendrait de rétablir. Yvon Dallaire (2001 : 52) compare différentes sociétés animales aux sociétés humaines , en s’appuyant sur l’idée d’une nature complémentaire des sexes. Il affirme que « dans la majorité, les sociétés de singes sont hiérarchiques et les mâles dominent les femelles », avant de conclure que
[t]outes les sociétés animales structurées sont matriarcales. Pourquoi en est-il autrement chez les singes et les humains? Parce que les mâles de ces espèces animales mammifères ont eu l’intelligence de s’élever au-dessus du joug de la femme/mère, et d’exister en tant qu’individus non asservis, se comportant selon les règles développées par leur sexe. Il y a là de quoi être fier! Mais attention, cette libération n’est pas encore terminée et est très fragile (Dallaire 2001 : 53) .

Le discours masculiniste est donc en phase avec le sexage de Colette Guillaumin (1992 : 19) qu’elle associe à une forme d’esclavage. Dans son analyse de l’économie domestique, elle définit le sexage comme « le rapport où c’est l’unité matérielle [la femme] productrice de force de travail qui est prise en main, et non la seule force de travail ». Au sujet des parallèles qu’elle dresse avec l’esclavage, Guillaumin (1992 : 18-19) précise que l’appropriation physique dans les rapports de sexes [...] est distincte [de celle relative au servage] par un certain nombre de traits dont l’essentiel, commun avec l’esclavage, est qu’il n’existe pas dans cette relation aucune sorte de mesure à l’accaparement de la force de travail: cette dernière, contenue à l’intérieur des seules limites que représente un corps individuel matériel, est prise en bloc, sans évaluation.

Le corps est un réservoir de force de travail, et c’est en tant que tel qu’il est approprié. Ce n’est pas la force de travail, distincte de son support-producteur en tant qu’elle peut être mesurée en « quantités » (de temps, d’argent, de tâches) qui est accaparée, mais son origine: la machine-à-force-de-travail [la femme].
Dans son expression concrète, le sexage comprend l’appropriation du temps et des produits du corps des femmes (les enfants), ainsi que l’obligation sexuelle et la charge physique des membres valides et invalides (soit ceux de la famille et de la société québécoise). Pour ce faire, la classe des hommes utilise divers moyens, dont le marché du travail, la justice et le droit, ainsi que le confinement dans l’espace et la violence, soit la contrainte sexuelle et physique.

Des masculinistes vont batailler en vue de maintenir et de renforcer les moyens dont disposent les hommes pour assurer leurs privilèges. Par exemple, André Gélinas (2002) s’en prend à cette lutte féministe visant à éliminer les inégalités du marché du travail par le biais de sa dénonciation de l’équité salariale. Pour sa part, Yvon Dallaire (2005 : 129-130) dit « bravo » à l’arrivée des femmes « sur le marché du travail ou en politique avec leurs valeurs de compassion, de compréhension, d’égalité, d’aide aux autres », mais ajoute que « placer ces valeurs en priorité, c’est perdre l’efficacité, la rentabilité, la productivité ». Yvon Dallaire et André Gélinas plaident ainsi en faveur d’un marché du travail qui, pour reprendre les dires de Guillaumin (1992 : 39), « ne permet pas aux femmes de vendre leur force de travail contre le minimum nécessaire à l’existence, la leur », ou qui à tout le moins confinerait les femmes dans des secteurs précis, où les salaires sont généralement bas.

De plus, les diverses formes de violences faites aux femmes sont parfois justifiées et même perpétuées par des hommes associés au mouvement masculiniste (voir Blais 2008, Brossard 2008, Jobin 2008). Par le fait même, des masculinistes assurent la perpétuation de la violence contre les femmes, soit « cette sanction socialisée du droit que s’arrogent les hommes sur les femmes, tel homme sur telle femme, et également sur toutes les autres femmes qui "ne marchent pas droit" » (Guillaumin 1992 : 41). D’ailleurs, les médias nous informent à l’occasion de mises en accusation ou de condamnations d’hommes violents ou agresseurs qui auraient été associés de près ou de loin à des groupes d’hommes ou de pères (voir, à ce sujet, Dufresne 1998 ; Desjardins 2007). Au sujet des groupes de pères divorcés, rappelons que Colette Guillaumin (1992 : 22) précise que les « enfants restent […] un très puissant outil de chantage en cas de désaccord conjugal : c’est leur possession que revendique les hommes, et on leur charge matérielle, qu’ils s’empressent de confier à une autre femme ». Des masculinistes demandent le rétablissement d’un système de justice traditionnellement au service des hommes, tout en exigeant d’obtenir la garde des enfants sans pour autant questionner l’inégal partage des tâches relatives à leur soin et à leur entretien (Lavoie 2008).

Mentionnons un autre moyen de contrôle des femmes par les hommes, dont Colette Guillaumin ne traite pas, soit l’État (Lamoureux 2008). En effet, et surtout dans le contexte actuel, les décisions et les actions ou l’inaction de l’État (par exemple, le refus d’appliquer la politique d’équité salariale), maintiennent intactes la division sexuelle du travail et les diverses formes d’appropriation des femmes par les hommes. Pis encore, les revendications des masculinistes ont trouvé écho auprès des féministes d’État, comme en témoigne la commission visant à transformer le Conseil du statut de la femme en Conseil de l’égalité (Foucault 2008). En somme, ce qui est en jeu ici, c’est la possibilité pour les femmes d’exercer librement un choix de vie et de proposer une (re)définition générale des rapports entre les hommes et les femmes.
Conclusion

L’objectif d’exercer un contrôle plus ou moins explicite sur les femmes est associé à un autre objectif, qui consiste à attaquer les féministes qui luttent précisément pour émanciper les femmes du contrôle des hommes. L’impact du masculinisme est à ce point important que ses idées et préoccupations en viennent même à intoxiquer la pensée féministe. Mara Goyet (2007 : 196-197), auteure d’un livre sur le féminisme, consacre un chapitre au «masculinisme», qu’elle présente comme «un pendant masculin du féminisme». Selon elle, «il s’agit à la fois [d’une recherche de] l’égalité des sexes — mais d’un point de vue masculin — et [d’une lutte] contre les injustices, inégalités et discriminations dont les hommes sont victimes»; victimes d’une mauvaise image dans les médias, victimes (en tant que pères) des tribunaux dans les causes de divorce, et finalement, victimes d’une féminisation des professions52. Voilà qui montre bien à quel point les préoccupations masculinistes peuvent être reprises par des féministes.

La féministe Micheline Carrier note également que les thématiques masculinistes se sont répercutées jusqu’au comité de rédaction du magazine La Gazette des femmes, organe du Conseil du statut de la femme, qui propose depuis quelques années des dossiers aux titres équivoques, dont «Unisexe, la violence?». Le Conseil a aussi discuté de la responsabilité du féminisme dans «l’hypersexualisation» des jeunes filles et salué les «nouveaux pères» qui «font passer les enfants avant le boulot et deviennent pères au foyer». Le masculinisme est donc – partiellement – parvenu à détourner l’attention de certaines féministes vers l’intérêt des hommes, prétendant même explicitement que les féministes devraient s’occuper des hommes et de leurs problèmes. C’est ce qu’affirme Richard Shearmur, professeur et chercheur à l’Institut national de recherche scientifique (INRS) et qui signait à ce sujet une lettre d’opinion dans Le Devoir (10 janvier 2007), intitulée «Féminisme: accepter de se remettre en question».

En conclusion, le discours sur la crise des hommes participe de l’idéologie visant le maintien des privilèges des hommes sur le corps des femmes, ses produits, leur force de travail, leur temps, leur sexe. Le masculinisme valide ce « coup de force permanent qu’est l’appropriation de la classe des femmes par la classe des hommes » (Guillaumin 1992 : 16), et il n’est, par ailleurs, pas exempt de lesbophobie (Blais et Dupuis-Déri 2008 : 248-251). S’occuper des hommes, leur consacrer temps, énergie, attention et soins, n’est-ce pas là le reflet de l’assignation des femmes à des rôles déterminés, le reflet de la division sexuelle du travail et, par conséquent, celui de l’appropriation de la machine-à-force-de-travail, pour reprendre l’expression de Colette Guillaumin? Jean-Philippe Trottier (2007 : 43) laisse d’ailleurs entendre que le féminisme ne fait pas preuve « d’empathie pour le sort de l’homme, fait tout de même curieux, voire paradoxal, lorsque l’on sait que le féminisme lui-même […] se présente avant tout sous les atours de la compassion, de l’écoute et des douces vertus féminines ». Le discours de la crise des hommes comporte donc un double piège: culpabilisation des femmes et des féministes, et mise au pas. Les femmes et les féministes sont sommées de s’occuper des hommes, et les masculinistes sont très clairs quant à leur refus de laisser de la place aux femmes dans l’espace public, entre autres lorsqu’il est question d’égalité économique et politique.

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Mélissa Blais est agente de recherche à l’Institut de recherches et d’études féministes (IREF) et doctorante en sociologie à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Elle a co-dirigée l’ouvrage collectif Le mouvement masculiniste au Québec : L’antiféministe démasqué (Remue-ménage). Elle est également l’auteure du livre Entre la folie d’un seul homme et les violences faites aux femmes : la mémoire collective de la tuerie du 6 décembre 1989 (Remue-ménage, à paraître).

Francis Dupuis-Déri est professeur de science politique et membre de l’Institut de recherches et d’études féministes (IREF) à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Il a co-dirigé l’ouvrage Le mouvement masculiniste au Québec : L’antiféministe démasqué (Remue-ménage) et signé plusieurs livres et articles, sur les mouvements sociaux et les théories et pratiques démocratiques.

 

labrys, études féministes/ estudos feministas
juillet/ décembre 2008 -julho/dezembro 2008