Labrys
études féministes
numéro 4
août/ décembre 2003

 

La construction sociale du corps féminin

Christine Détrez

Résumé


Le corps, alors qu’il semble être le lieu de l’intime et du personnel, constitue le nœud où s’articule l’individu et le groupe, la nature et la culture, la contrainte et la liberté. Si les sociétés traditionnelles marquent la loi sur la peau comme sur un parchemin, dans nos sociétés contemporaines, le marquage social s’incorpore, façonnant les morphologies et les façons de se mouvoir, selon les représentations culturelles et les savoirs de chaque culture. Mais les stéréotypes culturels qui vont ainsi modeler les corps sont hiérarchiquement ordonnés : le corps de la femme est ainsi plus frêle, fragile, passif, hormonal, etc. que celui de l’homme. Les arguments biologiques et scientifiques interviennent pour justifier la domination subie par les femmes, dès les premiers temps de leur éducation. Les savoirs sur les corps sont ainsi des pouvoirs, mis au service d’enjeux politiques et symboliques.

Si la formule de Simone de Beauvoir « on ne naît pas femme, on le devient », a eu un tel succès, c’est sans doute qu’elle résume à elle seule tout le processus de socialisation qui régit l’existence des individus. Cette socialisation est également incorporation, modelage des corps par les normes et les représentations culturelles et symboliques propre à chaque société. Ainsi, paradoxalement, le corps, souvent entendu comme le lieu par excellence de l’intime et du personnel, peut-il être vu comme le noeud d’interaction entre l’individu et le groupe, la nature et la culture, la contrainte et la liberté.

Nature et culture

Longue est la tradition qui fonde les caractéristiques d’un individu dans sa nature biologique : la médecine hippocratique se base sur l’équilibre des humeurs composant le corps humain (la bile, l’atrabile, le sang et la lymphe). L’excès d’une de ces humeurs entraîne un trait de caractère particulier, association dont on perçoit encore les traces dans notre vocabulaire (les individus « bileux », « atrabilaires », « sanguins » ou encore « lymphatiques ») : la physiognomonie antique élabore ainsi toute une théorie associant types moraux et traits physiques. L’observation peut être zoologique -l’individu étant doté des aptitudes ou travers de l’animal auquel il ressemble- ethnologique, reposant sur une typologie morale des peuples, ou encore anatomique.

Dans cette unité de composition, il n’y a qu’un pas épistémologique à faire pour justifier, physiquement, les ordres sociaux. Comme le remarque ingénument Madame de Lafayette dans La princesse de Clèves, la cour des rois abrite « ce qu’il y avait de plus beau et de mieux fait, de l’un et de l’autre sexe ». Dans les contes du XVIIIe, tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes : les princes et princesses y sont charmant(e)s, les reines-mères ne peuvent être concurrencées que par leurs filles, princesses de sang, et les oripeaux de Peau d’Ane ne l’empêcheront pas, grâce à la finesse de son doigt, bien plus efficace qu’un pedigree officiel, de récupérer le rang qui est le sien, et d’épouser le prince.

L’association entre typologie physique, morale et sociale traverse les siècles : elle inspire la littérature du XIXe, et est au fondement de l’anthropométrie : conformément à l’entreprise générale de mesures, de classification, de mise en tableaux, en examens et en observations, dont Michel Foucault a montré l’importance dans le système cognitif français (Foucault, 1975), Broca, Lombroso et autres mesurent crânes, cages thoraciques, etc. pour en déduire des lois expliquant les actions des individus. On pourrait trouver au XXe et XXIe des dérivés féconds de cette biologisation du moral, que ce soit au fondement d’explications raciales durant la seconde guerre mondiale, ou comme clef de connaissance du comportement humain, notamment dans les départements américains de communication non verbale, certains enseignements de criminologie ou encore la morphopsychologie et la sociobiologie.

Il revient à l’anthropologie de rompre avec l’évidence du corps naturel : Marcel Mauss, à partir d’anecdotes tirées de ces souvenirs personnels comme d’exemples pris dans la littérature ethnographique, affirme ainsi qu ‘ « en somme, il n’existe peut-être pas de « façon naturelle » chez l’adulte » (Mauss, 1950), mais que chaque geste, chaque attitude dépend de la société à laquelle on appartient, est modelé et façonné par l’éducation et l’imitation. Cette entreprise pionnière trouve d’illustres applications dans les années 40, qui prennent tout leur sens dans un contexte de réaction aux thèses raciales : Gregory Bateson et Margaret Mead étudient les attitudes des Balinais, et montrent que même la position nonchalante d’une main au repos est modelée par la représentation du corps prédominante dans la culture balinaise (Bateson, Mead, 1942).

Contre les thèses nazies posant la supériorité comportementale des peuples aryens sur les peuples méditerranéens, rigueur et sobriété contre expansivité et affectation, David Efron étudie les comportements gestuels de deux générations d’immigrants juifs et italiens aux Etats-Unis (Efron, 1972) : si les attitudes corporelles des primo-immigrants se distinguent de celles des américains, notamment par leur exubérance, leurs manifestations face à la douleur, etc., en revanche, la deuxième génération, éduquée sur le sol américain, se distingue davantage de leurs parents que des américains de « pure » souche.
De façon sociologique, cette prégnance de la dimension culturelle, cette « dimension cachée » comme la nomme Edward T. Hall (Hall, 1971), est également déclinée selon l’appartenance sociale : selon leur milieu social, les individus se meuvent de façon différente. Ce constat, développé par Pierre Bourdieu dans sa théorie de l’habitus, n’est pas nouveau : déjà La Bruyère, dans ses Caractères, brossait les portraits physiques et gestuels du riche, Giton, et du pauvre, Phédon : « Giton a le teint frais, le visage plein et les joues pendantes (...) la démarche ferme et délibérée. (...) Il déploie un ample mouchoir, et se mouche avec grand bruit ; il crache fort loin, et il éternue fort haut (...) Il est riche », « Phédon a les yeux creux, le teint échauffé, le corps sec et le visage maigre ; (...) Il marche doucement et légèrement, il semble craindre de fouler la terre ; il marche les yeux baissés (...) Si on le prie de s’asseoir, il se met à peine sur le bord d’un siège (...) Il tousse, il se mouche sous son chapeau, il crache presque sur soi, et il attend qu’il soit seul pour éternuer (...) Il est pauvre. ». Détail intéressant, preuve s’il en encore besoin que l’hexis corporelle est loin d’être intemporellement et universellement liée à un statut social donné, entre La Bruyère et Bourdieu, les attitudes se sont inversées, l’exubérance et le bruit, le « grand mouchoir de tissu, dans lequel on souffle très fort d’un coup et à grand bruit », le « rire à gorge déployée » se situant désormais du côté de l’hexis des classes populaires (Bourdieu, 1979 : 211).

Mais la rupture de l’évidence biologique ne s’arrête pas aux frontières de la peau, et ne concerne pas uniquement le corps en mouvement. Ce sont jusqu’à ses mécanismes les plus internes qui peuvent –et doivent- être analysés dans une telle perspective. Nombreuses sont les enquêtes qui mettent en évidence la corrélation entre variations morphologiques et niveau social : si ces travaux montrent que les « grands » de ce monde sont, en moyenne, plus grands que les individus de milieu moins favorisé, ce n’est évidemment pas pour conforter la thèse de l’adéquation biologique entre rang et corps, mais pour en expliquer et dénoncer les processus d’élaboration. Comme la morphologie, la morbidité et la mortalité sont liées au niveau social : en terme d’espérance de vie, on observe une différence moyenne de 6 ans et demi entre les ouvriers et les cadres.

Les marquages des sociétés traditionnelles, qui, par scarification, tatouages, peintures ou parures, indiquaient le rang, la place de l’individu dans le groupe n’ont donc pas disparu de nos sociétés contemporaines. Si la loi sociale ne se marque plus sur la peau comme sur un parchemin (on pourrait d’ailleurs objecter que les rides ne sont pas également réparties, et que tous et toutes n’ont ni la même attention, ni les mêmes moyens à accorder à ce marquage du temps sur leur corps, qui devient alors également marquage social...), en revanche, elle s’est intériorisée, incorporée au niveau bien plus essentiel de la morphologie.

Même les sensations, qui apparemment, répondent à des processus biochimiques traductibles en équations, avec toute la force de généralisation et d’universalisation que comporte le langage mathématique, n’échappent pas à la relativisation : les témoignages sur les enfants sauvages, enfants loups, enfant ours, etc., sont particulièrement efficaces en ce qu’ils cristallisent sur une durée très courte l’évidence de processus d’éducation qui mettent des siècles à s’instaurer (Corbin, 1982 ; Elias, 1973). Victor, l’enfant loup de l’Aveyron, quand il est recueilli, ne manifeste ainsi aucune sensation de brûlure, ni de froid : il mange des pommes de terre brûlantes, reste des heures sous la pluie sans exprimer le moindre inconfort. On lui loge du tabac dans la narine sans que cela le fasse éternuer. C’est au fil des années, au contact avec ceux qui ont entrepris de le « civiliser » qu’il va acquérir le sens de la douleur et des variations de température.

Corrélativement à cet apprentissage des sensations, il va, également, tomber malade. Il ne s’agit nullement ici de remettre en cause les explications biochimiques des sensations, mais de montrer que celles-ci passent également par un décodage culturel, variable selon les pays : Edward T Hall développe ainsi plusieurs exemples montrant la variabilité de la sensibilité au bruit, aux odeurs, selon la nationalité (Hall, 1971). Le corps, comme une langue, est soumis aux grilles culturelles de chaque pays et de chaque groupe social, selon « un code, secret et compliqué, écrit nulle part, connu de personne, entendu par tous » (Sapir, 1967)

Le terme de « construction sociale » ne vise donc pas à remettre en cause la réalité des phénomènes biologiques. C’est plutôt la mise en évidence de la dialectique entre l’individu et le groupe, la nature et la culture. En effet, le corps apparaît comme l’interface entre l’individualité, dans ce qu’elle a de plus unique, et le groupe, mais également entre la biologie et le social : que l’on prenne l’exemple de la marche, utilisé par Marcel Mauss pour expliciter sa notion de techniques du corps. Un enfant, pour marcher, doit avoir la maturité physique, morphologique et musculaire nécessaire, située en moyenne autour de douze mois. Il apprend alors à marcher comme le font ses parents, ses frères et soeurs : Marcel Mauss distingue ainsi la démarche des Françaises et des infirmières américaines, celles des femmes européennes et des femmes maoris.

Mais malgré ce modelage culturel, chacun a pourtant une démarche particulière, qui permet parfois de reconnaître quelqu’un de loin, avant même d’avoir aperçu son visage. Norbert Elias prend quant à lui l’exemple du sourire (Elias, 1991) : le sourire est une manifestation biologique, présente dès le premier jour, mais qui ne se trouve dotée de significations que par la socialisation du bébé, qui apprend à manifester ainsi son contentement. Néanmoins, chacun a un sourire qui lui est personnel...

Le corps est ainsi le lieu où se nouent et s’articulent nature et culture : un donné apparemment aussi naturel que le corps, assemblage d’os, de chair, de muscles et de fluides divers, se trouve, avant même la naissance, dès l’élaboration comme foetus, modelé par les normes et représentations en vigueur : celles-ci varient selon le lieu et l’époque, et également selon la situation sociale dans laquelle il s’insère (ce qui explique d’ailleurs la remise en cause de la conception moderne et légitime de la médecine, qui, tant par ses schémas que par ses méthodes d’observation, comme l‘échographie, sépare le foetus de son environnement et donne à voir la gestation comme une succession d’étapes chronologiquement enchaînées, Birke, 1999).

Ce donné naturel, déjà pas si naturel qu’il y paraissait au premier abord, est mis en jeu par des usages sociaux et culturels, qui vont dicter la façon de le soigner, de le traiter, de le vêtir ou le nourrir, de le mouvoir, etc. Ce traitement culturel, produit de l’éducation, de la civilisation, est à tel point intériorisé et incorporé qu’il en devient une « seconde nature », comme l’on peut dire de la grâce qu’elle est « naturelle ».... C’est toute la différence entre les Guermantes et les Verdurin, chez Proust, ou, plus près de nous, entre Ariane et sa belle-mère, Madame Deume, dans Belle du Seigneur, d’Albert Cohen : l’une, héritière noble, est toujours belle, gracieuse, élégante et aérienne dans ses robes voiles. L’autre, bourgeoise parvenue, est empruntée, gauche, engoncée dans du taffetas craquant.

Les mises en jeu du corps féminin

Les usages sociaux du corps ne se résument pas à la place occupée dans l’organisation des groupes sociaux : le corps du bébé, de l’enfant qui grandit, de l’adulte est, avant tout, celui d’un garçon ou d’une fille. Il l’est même de plus en plus tôt dans l’esprit des parents, de par la généralisation de l’échographie, dont on sait quels ravages elle cause dans des pays comme l’Inde ou la Chine, où l’identification du foetus comme fille entraîne souvent l’avortement.

Il semble en effet évident que le corps est porteur de l’identité sexuée, marquée par les organes sexuels qui font que chacun, biologiquement -et sauf cas extrêmement rares d’hermaphrodisme- est soit un homme, soit une femme. Mais les soi-disant évidences biologiques semblent n’exister que pour mieux être contredites et mises à mal par les sociologues et anthropologues si mal intentionnés.
L’adéquation entre organes sexuels et « genre » ou « lived body » (avec tous les débats portés sur cette distinction : Butler, 1993 ; Moi, 2001 ; Young, 2003.) Comme le rappellent ces auteures, il est évident que la distinction entre sexe et genre ne doit pas reproduire une distinction nature/culture) est loin d’être un universel : chez les Nuers du Sud du Soudan, seule la femme ayant eu des enfants est considérée socialement comme une femme, la femme stérile, socialement homme, doit alors prendre épouse et est considérée comme le père des enfants de celle-ci (Evans-Pritchard, 1973) ; chez les Inuits, le genre n’est pas fonction du sexe anatomique mais du genre de l’âme-nom réincarnée : un garçon peut être, de par son âme-nom féminine, élevé et considéré comme une fille jusqu’à la puberté, remplir son rôle d’homme reproducteur à l’âge adulte et se livrer dès lors à des tâches masculines au sein du groupe familial et social, tout en conservant sa vie durant son âme-nom, c’est à dire son identité féminine. « Cela ne va pas sans douleur pour tous les partenaires. Lorsque Iqallujuq dut revêtir contre son gré ses premiers vêtements féminins, sa mère, de son côté, pleurait de voir la réincarnation de son père soumise à la menstruation » (Héritier, 1996 : 202).

Dans nos sociétés contemporaines, où le parallèle entre sexe biologique et genre social semble moins sujet à aménagements, on pourrait également interroger l’adéquation entre attribut physiologique et identité psychologique : les transsexuels en manifestent de façon la plus évidente et souvent douloureuse le chiasme. Le héros d’un roman de Noëlle Châtelet, La tête en bas, inspiré de témoignages qu’elle a recueillis auprès d’une personne réellement rencontrée, peut nous servir ici d’illustration littéraire : Denise/Paul est hermaphrodite. Socialement déclarée fille, et élevée comme telle, elle se découvre, au fil de l’enfance et de l’adolescence, bien plus garçon que fille. La résolution du conflit ne peut passer que par une nouvelle naissance par la folie, le changement de Denise en Paul, et l’ablation des seins, signe extérieur de féminité.

Mais de façon plus générale, l’identité sexuelle est le produit d’un processus de sexuation et d’incorporation de principes sexuants. Si être une fille est donné par la nature, être féminine, se comporter comme une fille, est le produit d’un apprentissage. Le marquage sexuel des corps a été amplement montré pour les sociétés traditionnelles : les femmes diola de Casamance, les femmes Baruya de Nouvelle-Guinée doivent ainsi se soumettre à des rites, qui, le plus souvent par la force des coups, inscrivent leur féminité sur leur peau.

Apprendre à être femme, c’est également apprendre à se comporter, corporellement comme une femme : les femmes kabyles doivent ainsi marcher tête baissée, et même la répartition des tâches, dans la division sexuelle du travail, reproduit ce schéma, puisqu’elles sont assignées, corps ployé, au ramassage des olives, l’homme, quant à lui étant debout, tête haute (Bourdieu, 1980).

Etudiant un corpus de photographies publicitaires, Erving Goffman a montré comment notre société « ritualisait » la féminité, en pointant les stéréotypes des comportements supposés féminins (Goffman, 1977) : les femmes sont ainsi photographiées dans des attitudes subalternes, à côté d’hommes plus grands, plus forts, protecteurs. Elles sont souriantes et timides, douces, réservées, à la fois femmes-enfants et femmes-fleurs.

C’est jusqu’à l’attitude des mains qui est signifiante, masquant pudiquement le sourire, ou nonchalamment abandonnées comme en une caresse. La récurrence des mêmes gestes dans ce corpus en trahit l’aspect codé : tête penchée, flexion d’un genou, mordillement du doigt ou d’une mèche de cheveux, autant d’attitudes censées représenter les expressions « naturelles » de la féminité. Renvoyer ces stéréotypes à la seule artificialité du média (la photographie de mannequins posant devant l’objectif du photographe) serait méconnaître la force des représentations. Comme le souligne Goffman, les photographes ne font que « conventionnaliser nos conventions, styliser ce qui l’est déjà ».

La situation matrimoniale offre une autre occasion d’exposer les stéréotypes corporels, à tel point intériorisés qu’ils passent pour le fameux coup de foudre, le miracle de l’amour, « parce que c’était lui, parce que c’était elle ». Les annonces mettent ainsi en exergue les attendus, notamment physiques, à l’œuvre à l’état implicite dans les relations habituelles : l’homme y est demandé grand et fort, la femme fine, et mignonne (De Singly, 1984 ; Pagès-Delon, 1985). L’homogamie sociale est ainsi le produit certes de la communauté des lieux de vie et de travail, mais aussi du partage des mêmes idéaux physiques. Dans le marché matrimonial comme dans le marché de l’emploi, le poids des apparences est ainsi déterminant.

L’anthropologie et la sociologie ont bien montré combien l’éducation est sexuée, et comment cette distinction entre façon d’élever les filles et les garçons a à voir avec le corps, la façon de le tenir, de le nourrir, de le vêtir. La littérature offre ainsi un réservoir d’exemples de choix, qui de la petite fille modèle des romans de La comtesse de Ségur aux petites filles mal modelées des romans contemporains, révèlent la force des représentations (Détrez, Simon, 2004). Paradoxalement, ces petites filles « ratées », mal dressées, révèlent, en creux, l’efficacité des modèles stéréotypés.

On les regarde de travers parce qu’elles jouent au ballon plutôt qu’à la poupée, parce qu’elles ont les cheveux courts et les cuisses musclées. Le « ventre dur », la « poitrine musclée », les « épaules fortes » de la petite Nina de Garçon manqué (Bouraoui, 2000) sont aussitôt interprétés comme des signes d'anormalité par des parents à l'affût des moindres indices génériques, qu’ils soient biologiques (les règles, la naissance de la poitrine, la sonorité de la voix) ou comportementaux.

Le comportement vient en effet redoubler la morphologie, dans un mouvement dialectique puisque ce sont certes les jeux violents qui musclent le corps de ces enfants, mais que, de la même façon, chaque geste est sexué : « Il n’est pas vrai que les garçons et les filles dorment de la même manière, s’assoient ou marchent de la même manière.

C’est toujours différent […]. J’étudie, j’apprends la différence et m’applique » (Châtelet, 2002 : 39). Un même signe peut être équivoque : les parents de la petite Nina voient dans la crème Nivéa dont elle se tartine un signe rassurant de féminité, alors que la petite fille mime en réalité le rituel du rasage masculin. Denise/Paul apprend à uriner debout, comme un garçon. Par la répétition de cet acte, elle/il parvient même à changer sa morphologie, à « ne pas fuir par en dessous » (Châtelet, 2002 : 58). N'est-ce pas d'ailleurs ce qui menace la petite Nina ? « Nina, un garçon manqué, Nina, une fille ratée. Nina, à force, il te poussera un zizi. Ou une barbichette » (Bouraoui, 2000 : 107).

Le comportement vestimentaire est à ce niveau crucial, l’habit étant censé « faire » la petite fille, ou inversement, la « défaire ». La métamorphose physiologique évoquée ci-dessus de la petite Denise/Paul suit l’achat d’un costume de garçon, et est attribuée « aux vertus du pantalon gris de laine vierge ». Nina, de la même façon, refuse de quitter le pantalon qui lui a été prêté par un ami, comme si celui-ci, par une sorte d’osmose ou de métonymie lui conférait, enfin, la virilité. Ici encore s'opposent les « vraies » fillettes, à rubans et falbalas, et ces petites filles « ratées » qui refusent les jupes et les robes, tout le « tralala » : « Porter de vraies chaussures, des chaussures qui ferment. Ne pas manger avec ses doigts. Dire bonjour et merci. Porter des robes. Se taire » (Bouraoui : 95). Parce qu’elle est vécue comme un déguisement imposé, un travestissement en fille, la robe n’est plus instrument de séduction, mais de torture et de déformation de l’identité profonde : Denise/Paul la sent « battre sur ses jambes comme des gifles, coller à la peau comme des insultes » (Châtelet : 48).

La différence biologique entre les hommes et les femmes, inscrite dans l’anatomie, intervient comme une justification a posteriori, par le recours à la nature, de la différenciation sociale des genres : comme le montre Françoise Héritier, il n’y a pas de raison biologique pour que, dans la plupart des tribus, les femmes soient reléguées à la cueillette et les hommes à la chasse, quand on sait qu’elles sont tout aussi capables qu’eux de parcourir de grandes distances. L’examen des schémas présentés dans les manuels de médecine montre également combien la science est mise au service de cette essentialisation des « qualités » afférées à chacun des sexes.

Pendant longtemps, le sexe de la femme était représenté comme un organe masculin inversé, imparfait (Laqueur, 1990). Mais la médecine actuelle est tout aussi sexuée : dans les manuels, la femme est représentée quand il s’agit de montrer le cœur, siège des sentiments, ou d’expliquer la reproduction, comme si son corps était essentiellement réduit à sa fonction reproductive. Le clitoris, cet organe dévoué au seul plaisir de la femme, est le grand absent des manuels (Tuana, 1989 ; Birke, 1999). La femme « normale » est celle en pleine possession de ses moyens reproductifs, comme si la femme ménopausée, ou la femme sans enfants, n’étaient pas des femmes accomplies. Lynda Birke cite ainsi les réactions aux Visible Human Project : parce que le corps de la femme « découpée » est celui d’une femme de plus de cinquante ans, des protestations ont eu lieu pour que ce soit celui d’une « vraie » femme, c’est à dire d’une femme non encore ménopausée.

Le savoir enseigné est ainsi particulièrement orienté, mais la façon de l’enseigner renchérit sur cette dimension. Les métaphores utilisées ne sont pas neutres : le corps est une machine, une usine, un moteur. Il est le lieu d’attaques, d’agressions, de ripostes. Quant à la reproduction, elle met en scène des spermatozoïdes fringants et vaillants, se battant pour arriver le premier au cœur de l’ovule, immobile et passif, chose inerte n’attendant que d’être conquise. Même si on est loin des théories aristotéliciennes, où le ventre féminin n’était que le réceptacle du pneuma, le principe de vie masculin, néanmoins, certaines descriptions reproduisent la même dichotomie entre activité et passivité, compétition et attente féminine du gagnant, comme dans les preux tournois où la belle se contente de regarder les chevaliers combattre, accordant son cœur et ses rubans au vainqueur.

Les livres censés expliquer le corps humain aux enfants sont à ce titre exemplaires : quasi systématiquement, les planches anatomiques reproduisent le corps d’un homme, ou d’un petit garçon quand il s’agit de situer les muscles ou le cerveau. Le corps féminin est utilisé pour expliquer le système lymphatique, le système sanguin, les hormones, le système digestif. Les illustrations de ces livres destinés aux enfants sont également édifiantes : dans les chapitres consacrés aux muscles, les filles tiennent des poupées (muscles des bras) alors que les garçons shootent dans un ballon de foot (muscles des jambes). Les filles sont en tutu de danseuses, les garçons montrent leurs biceps. Les filles mangent des pommes, les garçons des hamburgers. Les garçons font des pompes, courent, font de l’escalade, les filles dorment, ou se prélassent dans un hamac, avec un titre éloquent : « du nerf ! » (chapitre sur les nerfs, Le corps humain, Nathan) .

Au mieux, elles dansent, ou nagent (retrouvant ainsi l’élément qui est le leur, le liquide).
Si la socialisation à la répartition des rôles et des tâches assignées à chacun des sexes a déjà été montrée dans les albums et livres pour enfants, il me semble que cette orientation des encyclopédies pour enfants est d’autant plus efficace qu’elle utilise la force de la légitimité de la science, détentrice autorisée des savoirs sur le corps dans nos sociétés contemporaines. Par la force des représentations anatomiques, les différences sociales se trouvent naturalisées, inscrites dans la profondeur du biologique : la petite fille apprend ainsi très vite que le corps de la femme est lymphatique, soumis aux fluides et aux hormones (comme si le système hormonal n’existait pas chez les hommes…). Elle apprend également dans ces pages que son accomplissement et sa raison d’être biologiques sont d’enfanter. On lui apprendra ensuite -contes, albums et dessins animés à l’appui- que c’est à elle que revient la fonction d’élever les enfants, de les habiller, de les nourrir, d’assurer la bonne marche de son foyer pendant que son mari travaille au dehors, et rentre le soir épuisé.

Le corps féminin : un enjeu

Car la construction sociale et culturelle des corps n’est pas gratuite. Le corps agit ainsi comme le support de valeurs symboliques, comme le montrent par exemple toutes les stigmatisations assignées à la gauche par rapport à la droite, et ce depuis l’étymologie latine (senester a donné gauche mais aussi sinistre, dexter ayant donné droite et dextérité…) (Hertz, 1970). Or, la distinction des sexes est hiérarchiquement organisée dans ces systèmes de valeurs symboliques. Selon Françoise Héritier, si des attributs sont assignés à chacun des sexes (froid/ chaud ; humide/ sec…), la valence qui leur est accordée varie : si le chaud comme le froid peuvent être attribué indifféremment par exemple au corps féminin, selon les cultures, ce sera en tout cas le terme féminin qui, dans cette culture donnée, sera hiérarchiquement inférieur.

La valence différentielle des sexes est ainsi fondée sur une essentialisation biologisante. Pierre Bourdieu, pour la société kabyle, a montré la même équivalence entre les qualités attribuées à chacun des corps des deux sexes et leur place dans la hiérarchie des systèmes de valeurs : la femme est du côté du gauche, l’ouest, le malheur, l’humide, le courbe, le h’aram (c’est à dire la magie maléfique). L’homme est à droite, du côté de l’est, du sec, du jour, du nif (le sacré licite). La maison kabyle réfracte et matérialise cette division des valeurs, puisque l’agencement des corps y est spatialement organisé : l’espace féminin est à gauche dans la maison, l’espace masculin à droite. Ainsi, « l’espace des objets, cette sorte de livre où toute chose parle métaphoriquement de toutes les autres et dans lequel les enfants apprennent à lire le monde, se lit avec tout le corps, dans et par les mouvements qui font l’espace des objets autant qu’ils sont faits par lui » (Bourdieu, 1980 : 129-130).

La ritualisation du corps féminin est ainsi instrument de sa domestication, de sa maîtrise : les historiens du vêtement ont montré combien le corset féminin est un tuteur physique, au même titre que les tuteurs légaux que sont le père, le mari ou le frère (Perrot, 1984). La chair molle doit être contrainte, le beau sexe étant surtout un sexe faible. Outre la valeur ostentatoire des rubans et dentelles dans un système économique où la rigueur professionnelle des hommes passe par la monochromie et la sobriété des coupes, et où la femme sert ainsi de « mannequin » de la réussite sociale, les vêtements des femmes sont également un moyen de maîtriser et dompter l’animalité supposée. Ainsi, les corsets très serrés ont également pour effet d’entraver la libido féminine, et d’entraîner la frigidité.

Conformément au processus de civilisation tel que l’explique Norbert Elias, la suppression des entraves, le dévoilement accepté de la peau (que l’on pense à Orlando, le héros de Virginia Woolf dans le roman éponyme : au cours de ces divers passages entre identité masculine-Orlando et féminine-Orlanda, il s’étonne ainsi, dans son corps de femme, de voir l’émotion des hommes devant sa cheville découverte…) n’est nullement une manifestation de l’affranchissement des contraintes symboliques. Bien au contraire, l’animalité se doit toujours d’être chassée : la jambe dénudée doit être épilée, la main dégantée doit être soignée, les ongles vernis et polis, le corps musclé, comme corseté « de l’intérieur ». Même les odeurs du corps doivent être éradiquées ou masquées, à coup de déodorants et de parfums subtils et discrets : Alain Corbin a ainsi montré la valeur morale des parfums, et la distinction entre les senteurs discrètes comme celle de la jonquille ou de la rose, et les parfums entêtants des tubéreuses, parfum des mulâtresses et des maîtresses que Baudelaire célèbre dans ses poèmes (Corbin, 1982).

La naturalisation de la différence des sexes sert ainsi de fondement biologique à l’inégalité des hommes et des femmes. Pour Françoise Héritier, l’explication « naturelle » de l’infériorité de la femme réside ainsi dans son corps, lieu de souillure, notamment à cause du sang menstruel : la femme serait celle qui laisse couler son sang, passivement, alors que l’homme lui, décide quand le sang doit couler, par la guerre, la chasse, etc.
Au dualisme esprit-corps correspond ainsi l’équivalent homme-femme. A l’homme la création, la raison, la sphère publique, à la femme la procréation, les émotions et les passions : d’Aristote aux encyclopédies pour enfants, les thèmes n’ont guère évolué. Ce partage des domaines est évidemment organisé hiérarchiquement, puisque toute la tradition judéo-chrétienne, ainsi que philosophique, associe le corps au péché, au tombeau de l’âme (que l’on se souvienne du jeu de mot employé par Platon soma/séma : corps/tombeau). L’Immaculée Conception est bien le symbole de cette dichotomie entre corporalité et spiritualité.

L’anecdote rapportée par Nancy Huston dans son Journal de la Création prend ainsi valeur de parabole : elle y raconte comment une amie polonaise, hospitalisée quinze jours avant la date théorique de son accouchement, a été accouchée de force, par césarienne, une semaine avant le terme. Les lits de l’hôpital étaient en effet réquisitionnés afin d’accueillir d’éventuels fidèles évanouis ou passants piétinés lors de la visite à Varsovie de … Jean-Paul II : « cette histoire ne cesse de m’obséder, tant elle me paraît emblématique d’une certaine dichotomie violente… Combien de corps de femmes ont été ainsi charcutés –combien de ventres intempestivement ouverts au bistouri, […] – à cause d’un seul homme vierge, chef spirituel de tous les catholiques » (Huston, 1990 : 12).
Nancy Huston, dans ce même livre, montre bien comment l’art est toujours associé à la figure masculine, la femme n’étant que nature, ou au mieux, créature d’un démiurge créateur, Dieu ou artiste : Athéna et Zeus, Pandore et Héphaïstos, Galatée et Pygmalion, Olympia et Coppélius, Eve et Adam, et autres My Fair Lady. La statue créée par Pygmalion surpasse ainsi en beauté les « vraies » femmes, produit de la seule nature. A terme, la femme modèle disparaît derrière l’oeuvre accomplie, bien plus parfaite et vivante qu’elle ne l’est : l’artiste du Portrait Ovale, d’Edgar Allan Poe, ne s’aperçoit pas, tout à son art, que sa femme est morte, épuisée par les séances de pose.

Comme le dit explicitement Sartre « dans cette œuvre d’art impérissable que je tentais de construire, la femme représentait la matière brute que je devais informer » (Sartre, 1983, cité dans Huston, 1990). Pour être artiste, la femme doit ainsi nier son côté féminin, mortifier son corps : Virginia Woolf, Simon Weil sont des exemples typiques, qui, par l’anorexie, le refus de la sexualité et de la maternité, tentent de résoudre, sans la remettre en cause, l’inconciabilité de la femme et de l’esprit. Il est intéressant de voir que la revendication artistique des femmes de la fin du XXe siècle passe justement par une mise en exergue du corps.
Les artistes plasticiennes portées par le body art, comme Annette Messager, Marina Abramovic ou Cindy Sherman, écrivaines dont les romans décrivent les réalités du corps les plus matérielles et les plus crues, répondent ainsi à la volonté affichée des années 70 d’écrire avec son corps, d’écrire le corps, mais dont on peut se demander si elles échappent et subvertissent réellement les clichés : en effet, paradoxalement, à trop se focaliser sur leur corps et ses expressions, n’y a-t-il pas risque d’entériner, d’une nouvelle façon, l’association entre femme et corps, en substituant au « mulier in utero » antique un « mulier in vagino » moderne ? (Détrez, Simon, 2003, 2004 b)
Portés par la légitimité scientifique, les savoirs sur le corps sont également des pouvoirs. Pouvoir de l’homme, pouvoir du législateur, pouvoir du médecin : le médecin est ainsi celui qui dicte la conduite normale, c’est à dire normée. Du traitement de l’hystérie (expliquée au XIXe siècle comme une altération due au non-emploi de l’utérus par des femmes n’ayant pas d’enfants) à celui de l’anorexie, la médecine est ainsi légitimée à traiter le corps des femmes, dont l’activité même de reproduction est de plus en plus médicalisée. Ainsi, le XIXe siècle a vu la prise de pouvoir de l’obstétricien, le plus souvent homme, sur les sages femmes, allant jusqu’à l’imposition à la femme d’une position d’accouchement (Gélis, 1988).
Dans le corpus de romans étudiés, c’est également au médecin qu’ont recours les parents pour soigner la féminité défaillante de leurs filles : l’enfant hermaphrodite est traitée à coups de piqûres hormonales, qui aboutissent à la pousse des seins. Enfin, les pratiques d’avortement forcé, ou de ligatures des trompes, notamment en Chine, suffisent à rappeler la violence réelle, et non plus « uniquement » symbolique qui sévit encore dans de très nombreux lieux sur le corps des femmes (Kleinman, Desjarlais, 1994) : si le clitoris, comme le montrent les analyses féministes sur la science, est effacé des manuels de médecine, il est, bien plus littéralement, excisé dans de nombreux pays. Rien d’étonnant alors que la revendication de leur autonomie par les femmes soit passée par la volonté de récupérer les droits sur leur corps et/ou par leur corps.
C’est ainsi que A.W. Frank interprète les diètes draconiennes des Saintes médiévales (Frank, in Featherstone, 1991) : ces jeunes filles de la haute société, dont la plus illustre est Catherine de Sienne, échappaient à un mariage imposé en se privant de toute alimentation, et en prétendant qu’inspirées par Dieu, elles agissaient ainsi pour le salut de leurs parents. C’est ainsi également que Michel De Certeau interprète les comportements des « sorcières » qui, par une mise en scène comportementale et langagière débridée de leur corps, provoquent l’ordre social, religieux et juridiques (De Certeau, 1990). Que les révoltes de ces femmes aient, le plus souvent, été soldées par l’échec ultime qu’est la destruction de ce corps par la faim ou le feu, importe, en définitive peu. Au-delà des siècles, elles nous montrent que le corps, lieu des dominations dans sa mise en jeu et enjeu de pouvoir peut et doit également être un lieu et enjeu protestataire.


références


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Note biographique


Christine Détrez est maître de conférences en sociologie à l’Ecole Normale Supérieure Lettres et Sciences Humaines de Lyon. Elle mène des recherches en sociologie de la culture et sociologie du corps, et a publié Et pourtant ils lisent, (avec Christian Baudelot et Marie Cartier, Seuil, 1998) et La construction sociale du corps (Seuil, 2002). Elle travaille actuellement, en collaboration avec Anne Simon, sur la représentation du corps féminin dans la littérature féminine contemporaine.

 

Labrys
études féministes
numéro 4
août/ décembre 2003